"Si la capacité des cons à s'auto-éliminer ne doit pas être négligée, la volonté effarante du monde moderne et de l'Etat-providence à les sauver rend vain tout espoir de sélection naturelle"

"Il y a deux aristocraties : celle du haut et celle du bas. Entre les deux, il y a nous, qui faisons la force de la France.

mercredi 29 août 2012

Naguère…


Il y a une question qui - à intervalle irrégulier et toutes époques confondues – doit tarabuster les archéologues et les historiens, du moins les moins idéologues et les plus consciencieux. Cette question à laquelle tout spécialiste soucieux de chronologie ne peut échapper est la suivante :

A quel moment "dater" précisément tel changement d’époque ?, tel "saut qualitatif brusque" pour causer comme les marxistes ?, telle rupture ?, tel basculement ?, tel changement de civilisation ?
Pour répondre à ces graves questions, les experts de la chose disposent de faisceaux d’indices qui leur sont fournis par toutes sortes de matériaux documentés, qu’il s’agisse de débris de vaisselle trouvés dans les fouilles, de chroniques de batailles, de stèles commémoratives gravées dans le marbre, de registres paroissiaux, d’inventaires successoraux notariés, etc. S’y ajoute désormais la masse considérable d’informations disponibles dans les textes administratifs et dans les résidus exploitables de la production journalistique. Reste à exploiter toussa…

Aux futurs historiens qui se pencheront sur notre époque (dans un paquet de lustres*, qui sait…) se posera forcément la question de dater, sinon le début, en tout cas la fin de cette séquence de temps appelée les "HLPSDNH"…
C’est au cours d’une période, somme-toute assez courte au regard des temps longs, située à cheval sur la fin du XX° et surtout le début du XXI° siècle (d’une ère dont la laïcité aura d’ici-là changé le nom), que ces HLPSDNH ont été évoquées de façon lancinantes, référence toujours présente, danger imminent, croquemitaine pour les enfants, etc. Curieusement, la sombre séquence d’histoire désignée par ce septagramme suscitait l’épouvante, marquait tous les esprits et meublait les incantations rituelles du clergé social au terme d’une longue période pourtant de vaches grasses. La fréquence et le nombre de films, de musées et mausolées consacrés à certains détails historiques veillait à en conserver la mémoire, un peu comme les bas-reliefs et fresques de danses macabres au Moyen-Âge. On pourrait donc naïvement dater la fin des HLPSDNH aux festivités ayant consisté à tondre des cohortes de femmes avec, pour faire bon poids, un certain nombre de sacrifices humains opérés selon un rituel ultérieurement et pieusement maintenu, notamment en Afghanistan et en Libye mais pas seulement. Mais il s’agit là d’une interprétation un peu trop rapide et superficielle des documents disponibles. La datation de la fin des HLPSDNH est probablement beaucoup plus récente qu’un vain peuple le pense…

En effet, les historiens d’après-demain ne manqueront pas de tomber sur la circulaire ministérielle NOR INTK1233053C du 26 août 2012 "relative à l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation des campements illicites" adressée aux Préfets (date d’application : "immédiate")

Et **, ils liront : "…Bien évidemment, l’action qui vous est demandée au profit de populations qui n’ont pas, naguère, bénéficié du respect républicain, prend place, avec ses spécificités, dans l’ensemble des politiques que vous conduisez pour les différentes catégories de populations en situation de fragilité."

Nous avons la réponse à notre grave question : Ils n'ont même pas dit "jadis" ! Les HLPSDNH se sont clôturées "naguère" ! C’est-à-dire, en bon français, "il n’y a guère de temps", "il y a peu de temps", "il n’y a pas longtemps", "dernièrement", "récemment", hier donc !

Disons… au mois de mai ? Exit 1789, exit 1936, exit 1944, exit 1981… Certes, certains historiens d’après-demain verrons sans doute dans cette formulation ministérielle une incommensurable vanité et une stupéfiante outrecuidance de la part de nos politiques et de nos haut-fonctionnaires, ainsi qu’une obséquiosité larvaire de la part de leurs scribes (on dit plume aujourd’hui, je crois) Mais ce n’est là que mauvais esprit…

* "Lustres" - "Il y a des lustres" : "il y a longtemps". Vient de lustrum, Dans la Rome antique, c’était le nom d’une cérémonie de purification qui avaient lieu tous les cinq ans lors de l’élection des censeurs. Ça désignait également l'espace de temps de cinq ans séparant deux cérémonies. A voir si le lustre qui commence restera illustre…
** N’hésitez pas à survoler la circulaire, ça vaut son pesant de volapük…

3 commentaires:

  1. Ptet bien que ce changement d'ère date de de Gaulle.
    Non, je plaisante ^^

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  2. Vous basez votre papier sur le fait que l'auteur d'une circulaire ministérielle connaît parfaitement le sens des mots qu'il emploie : vachement risqué, comme postulat…

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    1. Je ne me fais guère d’illusions sur ce point. Mais qu’importe ! Ils sont présumés payés pour employer le mot juste et pas pour laisser "l’assujetti" libre d’interpréter à sa manière ce qu’ils ont peut-être voulu dire ou "l’intention du législateur"… Ce qu’ils ont écrit est écrit. Tant pis pour eux !

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