Dans la vie je me suis doté d’un tas de petits principes accessoires à la con auxquels je me suis promis de ne pas déroger. C’est indispensable pour maintenir la santé mentale de la bête dans un environnement hostile. Parmi ces petits principes, il y a celui de manifester chaque année une totale indifférence à l’égard du bouquin couronné par le prix Goncourt… Non seulement je ne le lis pas, a fortiori ne l’achète pas, non seulement j’ai le snobisme de le dire dans les dîners, mais je me tiens aussi prudemment à l’écart des présentoirs des librairies pour ne pas être tenté d’en parcourir la quatrième de couverture. A l’évidence je n’ai globalement rien perdu d’essentiel… Je dis globalement pour ne pas me faire flinguer comme bourrin par certain(e)s que j'aime bien et qui ont tartiné des billets entiers sur le Houellebecq de l’an dernier…
Le prix Goncourt a été créé pour récompenser chaque année "le meilleur ouvrage d'imagination en prose, paru dans l'année" C’est ça qu’il voulait, Edmond. Vous le saviez et je ne vous l’apprends pas. Un ouvrage d’imagination, donc a priori un roman, genre littéraire pas très bien défini mais dont la caractéristique essentielle est d’être une narration fictionnelle plus longue qu’une nouvelle. La procédure de sélection retenue consiste à convier une brochette de vieux bonzes (souvent vieux avant l’heure) pour becter dans un grand restaurant et dire du mal de leur prochain entre le homard et la poularde en chemise. Et cela avec la certitude qu’ils se seront mis d’accord au fromage, tant il est vrai que copinage et renvoi d’ascenseur sont les deux mamelles qui fournissent le pain dont s’abreuvent Gallimard, Grasset, Albin Michel, Flammarion et le Seuil. Ainsi sortira forcément du chapeau l’édit... l’auteur du roman qui bénéficiera pour ses étrennes d’un coefficient multiplicateur du tirage (coefficient parfois modeste pour l’auteur archi connu par qui les couillons ne se laisseront plus avoir, coefficient toujours élevé pour les inconnus comme celui de cette année)
Bien sûr, je n’ai donc pas lu le prix de cette année et ne le lirai pas. Mais le lauréat-surprise sorti du chapeau se trouvant être un concitoyen de mon douar de cantonnement, j’ai eu la faiblesse de m’interroger à son sujet.
D’abord pourquoi ce bouquin ? Comme je me refuse dogmatiquement de le lire (faut bien que je sois fondamentaliste dans mes principes, sinon je vais où, là ?) qu’en dit-on ici et là ? A priori, ce n’est ni un essai d’historien comme le titre pourrait le faire penser, ni un récit de témoignage mais pas une fiction quand même… Un soliloque de commentaires perso’ sur des faits lus dans le journal et dans Mallet & Isaac ? Je ne suis évidemment pas du genre à accorder a priori foi aux pisses-copies des Inrocks qui écrivent : "Ce Goncourt 2011, l'avènement du toc contre la littérature." Mais quand même… Bien sûr il y a les critiques-mercenaires qui tirent à la ligne une fois le prix décerné : "chef d’œuvre", "coup de maître" en s’en tenant à des généralités. Mais dès qu’on prend la peine de lire en détail, on tombe très vite sur des "souffle virant parfois à l’emphase", "un peu barbant", "vire parfois au ronronnement rhétorique", "fresque pompière et académique", "lourdeur et boursouflure du style", "phrases alambiquées pour prouver que c'est écrit", "construction simplette au service d’un truisme", "fresque indigeste émaillée de lourdeurs et digressions"…
A priori, si c’est le roman de l’année, moi je suis père abbé chez les Clarisses…
Alors pourquoi ? Réfléchissons : On a là un "produit" au sujet duquel Le Monde parle d’une "réflexion complexe et profonde sur "la pourriture coloniale", sa manière d'infecter, encore et toujours, la société française…" Bref un truc tout à fait mainstream qui ne mange pas de pain, sans danger et même "éducatif" pour la santé mentale du pois-chiche cérébral de l’acuraba moyen qui en aura pour son argent.
En outre, on a là de quoi tirer à la ligne pour humidifier l’œil de Margot en brodant sur l’auteur, petit prof inconnu et étranger au milieu, qui a consciencieusement gratté son pavé manuscrit de 600 pages sur un coin de table de brasserie de la place Bellecour entre deux corrections de copies de lycéens avant d’oser timidement l’envoyer à un éditeur. Bref, le remake de l’écrivain romantique à écharpe et veste de velours injustement méconnu de la mythologie XIX° et pré-germanopratine… Bon ça pour la vente chez Gallimard (enfin, pour un Goncourt, ce fut plutôt un flop…)
Enfin, au moins cela aura-t-il permis à un prof de SVT de Saint-Marc, boîte privée des jèzes, lycée de la bonne bourgeoisie locale et pépinière de patrons d’industries, de nous faire connaître ses états d’âme.
Pour résumer la critique, je vous invite à lire celle-ci.
* Haire : chemise rude en crin ou poil de chèvre portée sur la peau par esprit de mortification et de pénitence… (cf. cilice)
"Si la capacité des cons à s'auto-éliminer ne doit pas être négligée, la volonté effarante du monde moderne et de l'Etat-providence à les sauver rend vain tout espoir de sélection naturelle"
"Il y a deux aristocraties : celle du haut et celle du bas. Entre les deux, il y a nous, qui faisons la force de la France.
J'ai le même principe que vous, je n'achète jamais le Goncourt ! Mais il m'est arrivé de le recevoir en cadeau et là que faire sinon dire "merci beaucoup" et le lire. Le dernier c'était il y a 2 ans (ou 3...), "trois femmes puissantes" et je me suis demandé si le jury l'avait lu avant de le récompenser tant le l'ai trouvé mauvais et inintéressant ( mais bon, je ne suis pas critique littéraire, je n'ai pas du comprendre toutes les subtilités de son style...)
RépondreSupprimerJ'en suis un autre. De toute façon, les snobinarderies germanopratines qui président à
RépondreSupprimerces sortes de cérémonies bien-pensantes laissent
croire qu'il vaut mieux lire autre chose.
Amitiés.
la haire...."laurent , serrez ma haine avec ma discipline...."
RépondreSupprimerc'est dans le tartuffe
tout ceci pour dire que cet art français est un art tout d'exécution , subtil , quoi
l'éxécution des autres, bien sûr