"Galipoff
mâchouillait le chewing-gum écœurant qui lui permettait de supporter ces
longues journées sans clopes. Au siècle dernier, le commissaire Maigret était
inséparable de sa pipe à la télé. C’est à ce genre de détail qu’on mesure le
chemin parcouru sur la voie du Progrès.
Fumer était
maintenant interdit partout, hormis au domicile de l’intoxiqué à condition
qu’il soit équipé d’une VMC dotée d’un filtre spécial. Même au grand air à la
campagne, on ne pouvait pas fumer à moins de 50 mètres d’une habitation, d’un
bâtiment agricole ou d’un champ cultivé.
Les fumeurs ne pouvaient plus souscrire d’assurance-vie mais il s’en
foutait, n’ayant ni enfants ni besoin de crédit immobilier. Il payait la majoration tabagique aux assurances
sociales et à la taxe carbone ainsi que la contribution
spéciale de solidarité au plan cancer. Ça lui donnait droit à la
"carte T", biométrique et mieux sécurisée que la carte Vitale. Elle
était indispensable pour pouvoir acheter des clopes chez le buraliste qui
tenait un registre plus contrôlé que celui des pharmaciens. Mais, comme tout le monde, il ne s’en servait
pas, n’achetant ses clopes qu’en contrebande. D’ailleurs, les buralistes
n’étaient plus que des marchands de bimbeloterie vendant les timbres-amendes et
les tickets à gratter. Quant aux taxes pharaoniques sur les clopes, elles ne
rapportaient plus rien à l’Etat. Il prenait quand-même la carte pour pouvoir
l’exhiber en cas de dénonciation par un voisin gêné de l’apercevoir fumant
derrière ses rideaux empuantis d’odeur de tabac…
Il avait
hâte de rentrer s’en allumer une dans le deux-pièces qu’il habitait depuis
qu’il s’était dépacsé d’avec
Samantha. Elle l’avait quand même supporté six ans - un record - après qu’il
ait divorcé. Son divorce lui avait d’ailleurs coûté la peau des fesses. C’était
parti pour une séparation amiable mais ça s’était terminé à ses torts
exclusifs. Car pour pouvoir arracher à sa cliente un doublement de ses
honoraires, l’avocat de sa femme avait invoqué son tabagisme en glissant sur le
fait qu’elle fumait aussi. Et son propre baveux, ce con, n’y avait vu que du
bleu…
Galipoff
mâchait donc son chewing-gum devant l’écran affichant […]"
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J’allais
oublier ! C’est aujourd’hui la Journée
sans tabac ! (et jeudi
prochain la Journée mondiale de
l’Environnement)
Je me suis
laissé prendre de court et n’ai pas le temps de chercher quoi dire sur les
dernières inventions de Marisol Touraine. Faut pourtant que j’en cause ! C’est
si important ; bien plus que le traité transatlantique ou le retournement
qui arrive…
Alors que
faire pour marquer le coup ?
Rien. Je me contente donc, histoire de meubler, de vous copier-coller quelques lignes
extraites de mon feuilleton d’octobre dernier.