Regardez comme ils sont beaux ! A l’appel d’Attac comme de juste et d’Alternatiba
(sans doute une Katiba alternative
et subventionnaire qui vient de sortir), ils étaient au moins 4.500 (10.000 selon les organisateurs) à se donner la main
aujourd’hui, sagement alignés sur le trottoir, le long du boulevard Voltaire où
les cortèges d’officiels de la COP21 ne passeront pas…
En cette période doublement d’état d’urgence (oui, la
guerre + le climat), on le sait, toutes les manifestations ont été interdites. Mais cette
chaîne humaine, hein, n’est "ni autorisée, ni interdite, c'est une zone
grise. On interprète ça comme une tolérance ", n’est-pas. Vu que cépapareil. C’est "un
contre-pouvoir citoyen" et l’adjectif qualificatif accolé en suffixe suffit
pour autoriser que la tolérance sorte des maisons dédiées…
Mais n’ergotons pas.
Ils c’est donc trouvé plusieurs milliers de guignols, sans doute un doux
mélange de boboïdes et d’instits écolos-en-chambre – merveille du vivrensemble™,
pour renoncer à leur conso en terrasse chauffée ou à leur promenade au parc et
venir par conviction se geler les burnes Bd Voltaire. Pour offrir un peu de spectacle
à quelques poignées de CRS emmitouflés dans leurs bahuts venus par principe
jeter un œil las sur leurs simagrées.
Regardez-les, disais-je. Ce n’est ni Halloween ni Carnaval mais ils ont
fait un effort méritoire. Tronche de zèbre en carton bouilli et truffe en
plastoc, Tigre en peluche, Lion débonnaire et Panthère pensive se mêlent
fraternellement, bras dessus, bras dessous, aux bipèdes humanoïdes. Nostalgie d’Arche
de Noé, dégoulinement de rêve métissé d’une fusion dans le même et l’éternel
futur !
Non. Pas bras-dessus, bras-dessous. Ils sont plantés côte à côte, non pas
ensemble mais seulement en même temps ; un peu comme une file d’attente
devant Pôle Emploi, un piquet de grève devant la Sécu on la queue devant l’épicerie
à Pyongyang…
S’écarteront-ils pour laisser la vieille retraitée accéder au
distributeur du Crédit Lyonnais ? Probablement, sûrement même. Ce ne sont
pas des black-blocs ! Ils n’ont rien cassé et, de toutes les façons, ils
ne cassent rien…
De la brochette de cette photo piquée à Ouest-France, je crois, je
retiens surtout le guignol à lunettes noires au fond : lui a fait l’effort
de faire sa propre pancarte. Pas une affichette ! il a pris le temps de découper
l’emballage de son sèche-linge ou de son home-cinéma livré la veille par Darty
ou Amazon, sans oublier la ficelle pour se la porter comme le chômeur de Chicago
pendant la grande dépression…. Surtout, il a rédigé sa revendication en deux
temps. Et pas dans la langue locale pour faire chic. "Nous avons besoin"… Oui mais de quoi au juste ? Il a
besoin de tant de choses… Ah oui ! "Nous avons besoin d’oiseaux de proie" ! Fallait y penser.
Ça dépend lesquels… Le con.
Il est vrai que, perso, j’entretiens des relations de bon voisinage, quoique
distantes, avec le couple d’aigles royale qui passe la crête à 13h chaque jour
en été pour venir marauder au-dessus du champ. Ce sont mes potes mais tant que
chacun chez soi, chacun pour soi… Ce pourrait être la même chose avec les
loups, mais comme disait Hortefeux, un ça va… L’éternelle question des
migrations invasives et de la démographie… On se comprend. Mais je m’égare…
Revenons à cette chaîne humaine. Elle n’a rien cassé. Toute mignonne,
elle était encensée en début d’après-midi par tous les sites d’infos en ligne.
Et, comme de bien entendu, elle s’est dispersée comme une volée de
moineaux apeurés pour laisser la place sur le pavé et dans les médias à la
petite centaine d’encapuchonnés masqués adeptes du bronx habituel.
Tous ces écolos de papier et bobos durables, en bons résistants à la mode
Café de Flore, ont posé un geste de témoignage sans lendemain. Et puis c’est
tout. Que déboulent les gros bras, ils n’en feront pas plus que de braves cathos sans défense au
sanctuaire brutalement occupé par Act-up… Qu’éclate un pétard comme l’autre
jour, ils se piétineront en débandade parmi les fleurs et les bougies qu’ils
avaient apportées…
La
COP21 est rassurée.
Et
quand le jour viendra, on fera avec…