Oualà. C’est complet. On ferme ! Mini-remaniement non-évènement, décevant pour les
commentateurs canal habituel qui
espéraient quelque chose pour tirer à la ligne. Ben non…
Ben si ! Ils
auraient quand même pu en tirer quelques petits enseignements. Mais voilà, il
valait mieux parler d’autre chose car ce n’est guère brillant. Il faut donc que
je me tape tout le boulot…
Bien sûr, il n’y a
pas eu d’ouverture, ni vers la gauche
de la gauche ni vers… quoi déjà ? Il fallait être naïf ou bosser à Libé
ou 20Minutes (c’est la même chose) pour envisager du
lourd. D’ailleurs, le simple fait d’évoquer des hypothèses comme celle d’aller
chercher Robert Hue montre bien le niveau de nos grands médias et à quel point
les commentateurs autorisés sont en
dehors du réel. Mais ça, ce n’est pas une nouveauté.
D’autre part, on
remarquera que les vraies créations
de postes portent sur des domaines sensibles importants où les ministres de
tutelle ont besoin d’être secondés : Commerce Extérieur, Formation
professionnelle, Agroalimentaire, voire Décentralisation. Tout cela avait dû leur
échapper, occulté par la nécessité absolue de doter de portefeuilles des
domaines comme la ville, la francophonie, l’égalité des territoires ou… la réussite
éducative. Mais ça non plus, ce n’est pas une nouveauté.
- Le premier enseignement,
c’est qu’en ayant un peu imprudemment érigé la parité arithmétique homme/femme
en règle absolue, on ne se simplifie pas un merdier déjà suffisamment compliqué
comme ça. Je ne sais pas combien de second canifs surnuméraires cela a coûté
dans la première version à 34 pour n’avoir pas à se priver de tel ou tel
compétence (ou
non)
portant couilles (j’ai
ma petite idée),
mais dans la version à 38, 37 auraient largement suffi.
Le plus ridicule, qui
m’a mis en joie, a été la façon dont l’Elysée a tenu à souligner que la place
des femmes avait été renforcée avec désormais davantage de femmes ministres de
plein exercice que d'hommes (11 contre 9) C’est ce qu’on appelle le respect
scrupuleux de la parité. Sachant
pourquoi la Batho était montée en grade, ils auraient mieux fait de glisser…
- Le deuxième enseignement
porte sur l’évidente insupportabilité de la Taubira. Ils l’ont voulue, ils
l’ont eu (et nous aussi) Certains doivent secrètement espérer qu’elle finisse
par faire une grosse connerie pour pouvoir la débarquer avant cinq ans. Ce
n’est pas gagné. Quoi qu’il en soit, au bout de trois semaines ce n’était déjà
plus vivable pour la pauvre Batho placée sous ses ordres. Je me demandais le 22
mai à quoi celle-là allait pouvoir servir à ce poste dans ce gouvernement,
sinon à faire des cocottes en papier. On a la réponse : elle n’est pas
remplacée. A dire vrai, je soupçonne que personne n’a voulu aller travailler
avec Taubira…
- Le troisième enseignement,
c’est, au-delà des effets de tribune, l’importance toute relative que le
gouvernement PS accorde à l’écologie quand ça touche au tiroir-caisse. Seul
mouvement de chaises musicales entre ministres de plein exercice au bout d’à
peine un mois aux affaires, le ministère de l’écologie,
du développement durable et de l’énergie échoit dorénavant à notre Delphine
Batho qui n’y connaît rien et ne risque pas de faire de vague. Quant à Nicole
Bricq, elle quitte le job pour s’occuper du Commerce extérieur qui en a bien
besoin.
Figurez-vous
que Nicole Bricq
avait annoncé la semaine dernière la suspension de l'attribution à Shell de
permis de forages au large de la Guyane. Elle voulait réexaminer l'ensemble des
permis d'exploration d'hydrocarbures, y compris ceux déjà attribués, dans
l'attente d'une refonte du code minier qui doit débuter cet été. Et voilà
qu’elle quitte le ministère concerné. Figurez-vous aussi que, selon un élu de
là-bas, le préfet de Guyane aurait obtenu le feu vert pour signer dès lundi les
arrêtés autorisant de nouvelles explorations. EELV n’est pas content…
- Le quatrième
enseignement est plus politicien : Si l’on excepte Benoît Hamon qui, en
prenant la Consommation, ne fait que décharger logiquement son ministre de
tutelle qui a suffisamment à faire, la seule ministre à voir son domaine de
compétence s’élargir – et s’élargir significativement – c’est Marie-Arlette
Carlotti. C’est qu’avoir dessoudé Muselier à Marseille n’est pas rien et il
s’agit de la soigner. Certes, elle a été un fidèle parmi les fidèles de Guérini
pendant très, très, très longtemps et ne l’a lâché non pas dès que ça a
commencé à sentir le roussi mais lorsqu’il n’y avait déjà plus rien à sauver
des flammes. Mais on n’en parle plus hein ? Montebourg doit la trouver
sympa. Il faut bien préparer l’après Guérini, n’est-ce pas… Et pour lui garder
la place au chaud à Marseille, en attendant il y a Sylvie Andrieux. Enfin pour l’instant,
en attendant que Sylvie fasse un tour aux Baumettes…
Carlotti récupère
donc la lutte contre l’exclusion.
Jusqu’ici elle n’avait que les Personnes
handicapées. Que, pour un gouvernement PS, les gay, les nègres, les gouines, les bougnoules, les trans,
les bâchées et autres stigmatisés fassent un lot homogène avec
les trisomiques, les malvoyants, les nains, les illettrés, les
culs-de-jatte et les schizophrènes est une idée qui me met en
joie et les différents intéressés m’excuseront…
Bon, mais de qui
relevait jusqu’alors la lutte contre
l’exclusion ? Ne me dites pas qu’ils avaient oublié ça ! J’ai (un
peu) cherché et je n’ai pas trouvé. Donc directement d’Ayrault… ou alors de…
Taubira. Raccrochez, c’est une erreur. On ne laisse pas des joujoux pareils à
une sale gosse imprévisible…
- Enfin, cinquième
enseignement : Ils se mordent déjà les doigts d’avoir embauché Yamina
Benguigui. Il paraît que la tension est palpable et que nombre de ses collègues
du gouvernement ne la supportent déjà plus. Une de la société civile totalement ignorante des rouages des
administrations et n’ayant ouvertement rien à foutre des domaines qui lui sont
confiés. Voilà l’exemple type de l’erreur de casting qui aurait été refusée
comme non crédible pour un scénario de film de série B. Elle n’est là que parce
que femme, algérienne, producteur engagé
de l’audiovisuel et militante des droits des sans-papiers… On ne peut plus la
virer comme les jupettes de Juppé. On se contente donc de lui retirer les Français de l’étranger dont je disais le
23 mai qu’elle ne s’occuperait pas. Il lui reste la francophonie. Nous avons donc une ministre de la francophonie avec
traitement, chauffeur, etc. Jusqu’ici, on n’avait pour ça qu’un
Haut-commissaire, un délégué ministériel ou quelque chose de ce genre. C’est
donc un progrès de la République sobre.
La preuve, c’est qu’on lui a baissé la paie de 30%. Reste 70% de trop…
Ah oui !
J’oubliais ! Faut quand-même que je vous cause des petits nouveaux :
D’abord, notons qu’il
y a trois sénateurs sur le lot. Jean-Pierre Bel s’était plaint qu’on avait
oublié le Sénat avec un seul sénateur sur 34 ministres dans la première
version. Ceci expliquant peut-être cela…
- Thierry Repentin, ministre délégué à la Formation professionnelle,
48 ans, marié, deux filles. Parcours classique : Sce Po de province, bosse
avec un député socialiste, puis au cabinet de son mentor Louis Besson à la
mairie de Chambéry puis au ministère du logement. Sénateur de Savoie, il s’est
spécialisé sur les questions de logement (les 20% de logements sociaux dans les
municipalités, la taxe sur les logements vacants, etc.) Il est ou a été
président de la fédération du mouvement HLM. Responsable du pôle habitat et ville dans l’équipe de
campagne de Hollande, tout le monde le voyait déjà ministre en mai. Au point qu’avant
même la nomination d’Ayrault des agences de communication ont acheté des noms
de domaine incluant "Repentin", anticipant des lois portant son nom…
Va pour la Formation professionnelle…
-
Anne-Marie Escoffier, ministre délégué à la Décentralisation, 70 ans. Elle est sénateur PRG de l’Aveyron.
Licenciée ès lettres. Une carrière entièrement consacrée à l’Administration,
gravissant les échelons depuis attachée de préfecture jusqu’à administrateur
civil à la direction des personnels du ministère de l’intérieur, inspecteur à l’Inspection
générale de l’administration, rapporteur général de la commission d’études sur
les relations financières entre l’État et les collectivités locales, etc. A été
préfet de l’Aveyron puis de l’Yonne jusqu’à sa retraite. Plus toute jeune, au moins
connaît-elle bien le merdier auquel elle va être confrontée. Après les affiches
de Music-Hall comme Najat Belkacem, Benguigui, Pau-Langevin et les renvois d’ascenseur
aux copains, on les sent un peu plus soucieux du réel…
-
Guillaume Garot, ministre délégué à l'Agroalimentaire, 46 ans, député-maire socialo de
Laval. Parcours classique : Sce Po, travaille au cabinet de Daniel
Vaillant à la mairie du 18° puis au ministère de l’Intérieur. Devient ensuite "plume"
de Delanoë. Soutien actif de Ségolène dans sa tentative de prendre le Parti au
congrès de Reims, c’était un bosseur au parlement. Bon, un homme de la Mayenne
à l’agroalimentaire, c’est cohérent.
-
Hélène Conway-Mouret, ministre délégué aux Français de l'étranger,
52 ans, enseignante élue en septembre dernier sénateur des Français de
l’étranger sur une liste PS-EELV intitulée "La France est notre pays, le
monde est notre avenir" (sic) Qu’en dire ? Au Sénat elle était
membre des groupes thématiques chasse et pêche ; communication
électronique et Poste ; économie agricole ; et… trufficulture. Wikipedia
n’a pas été foutu de trouver une photo d’elle 48 heures après sa nomination.
Son site perso sur le net est… bien gentil.
Bon,
Ayrault avait un problème : Compte tenu des trois précédents promus, il lui
fallait absolument trouver une femme pour équilibrer
les sexes. Et pour lui faire faire quoi ? Bingo ! On va en profiter
pour réduire le champ d’action de Benguigui ! Cette… comment déjà ?
Ah oui, Hélène Conway fera l’affaire…