Ray Bradbury est parti sur Mars finir le reste de son âge. Occasion
pour les bavasseurs de la presse et de la radio de faire l’éloge de cet auteur que
les incultes cantonnent à la science-fiction. Occasion pour les susdits un peu
documentés d’encenser au passage son
courage d’avoir écrit Fahrenheit 451
sous la chape de plomb d’un maccarthysme alors déjà fortement sur le déclin, car
tout est bon pour rappeler aux acurabas la mémoire des HLPSDNH. Pour meubler entre deux ébaudissements devant
la fermeté déjà tant de fois éprouvées
et renouvelée de notre cher
Président, il importe en effet de ne pas laisser passer une journée sans en
placer une pour ranimer la flamme de
la vigilance citoyenne face au risque naturel
majeur : Le retour des lugubres et sanguinaires forces obscurantistes
dont plus personne ne se souvient mais que nous connaissons bien. Tant il est
vrai que le mémoriel est le moteur de
notre avenir, la repentance son
lubrifiant et la vigilance son
carburant… C’est ainsi que l’Humanité peut avancer sur la voir radieuse de son
Salut ; surtout pas en regardant où elle met les pieds, non, mais en ne
quittant pas des yeux un rétroviseur déréglé où elle ne peut voir "qu’un ciel où rien ne luit". D’ailleurs,
nous sommes rassurés, notre Président l’a dit hier en Normandie : Il est le garant de la mémoire. C’est
déjà ça…
Où en étais-je ? Ah oui, Bradbury… Dans son
conte de fée, l’autorité faisait
brûler tous les livres. Eradication de la culture, des idées, des… de tout !
Etait-ce un roman de science-fiction
ou d’anticipation ? Imaginez l’horreur :
Nous serions privés d’Homère, d’Aristote, de Victor Hugo, de Cervantès, des pavés de Jules Verne, des flyers de
Hessel, de Christine Angot, de Béachelle et de Botul ? Heureusement que le
héros a eu des doutes et viré sa cuti…
Conclusion de l’enseignement subliminal (ou non)
dispensé par les répétiteurs des autorités morales, conscients de leur héroïque
mission de résistants institutionnels :
Nous devons rester vigilants.
Leur vigilance ne souffre aucune exception, sauf celles qui vont de soi. C’est ainsi
que, par exemple, un "groupe de défense des droits humains" tout ce
qu’il y a de plus officiellement accrédité comme conseiller auprès des organes
de l’ONU a réclamé que la Divine Comédie de Dante soit retirée de tous les programmes
scolaires de la planète. Cette
œuvre classique, qui est un
chef-d’œuvre de la littérature et une des assises de la langue italienne est en
effet désormais jugée raciste, homophobe, anti-islamiste et antisémite. "Particulièrement offensant et
discriminatoire, elle n’a pas
sa place dans une salle de classe moderne"
451 °F (à peu près 280°C), serait la température
approximative d’auto-ignition du papier ; mais ça dépend de sa composition
et des additifs qu’il contient…
Pour faciliter la tâche des vigilants et leur éviter d’avoir, comme autrefois Anastasie, à contrôler
les exceptions (même s’ils ne prennent pas la peine de lire quand l’auteur
est déjà sur la liste) je suggère que soit imposé aux imprimeurs des
normes très strictes quant aux qualités ignifuges (ou non) du papier utilisé
selon la nature du contenu et l’auteur des textes concernés. Dans certains cas
relevant autant du principe de précaution que de l’hygiène publique, il serait
bon de n’autoriser l’édition que sur papier "garanti 50°F" afin de
brûler immédiatement les doigts des imprudents prenant en main les ouvrages concernés.
Entre deux triturations de gamètes, les progrès de la science pourraient nous
faire ça (avec de juteux marchés en perspective, en Europe Afrique
boréenne comme du côté de la Chine, ce qui serait bon pour le Redressement productif…)
Pour l’écrit sur écran en ligne, ce devrait-être
encore plus facile…
Ca ne peut pas finir bien, démocratiquement, Dans un sens comme dans l'autre. C'est impossible.
RépondreSupprimerA.g.