Non, pas l’Etat d’urgence !
D’ailleurs, un Etat d’urgence où c’est que tout est permis et sans couvre-feu ;
où c’est que les "les trois sommations légales" se font au porte-voix
et pas à balles réelles histoire de montrer qu’on rigole pas ; on c’est qu’on
ne veut peut pas coller une munition de Famas dans le buffet de pillards
incendiaires cagoulés qui vous allument avec des "armes létales par
destination", c’est quoi, hein ? Un état de décence psychédélique peint
en fond de décor d’un théâtre amateur d’une MJC subventionnée ? Un état d’urgence
sanitaire ? Mais je m’égare...
Les tas d’urgences, disais-je. Vous les connaissez toutes : Le
chômage, les freins à l’emploi, la compétitivité, les déficits, l’avenir des
retraites, la démographie, la sécurité publique, etc. Et, surtout, l’urgence toujours
reportée de désigner enfin l'ennemi principal, celui qui constitue la menace la
plus concrète et immédiate pour notre existence même… Ben non, vous vous
trompez. Toussa cépagrave et peut
attendre.
L’important, ce n’est pas le changement,
c’est seulement le maintenant. La
seule chose qui compte, c’est de faire en
sorte que demain soit comme aujourd’hui. Après, on verra ; plus tard.
Certes, il est légitime que la commission de défense de l’Assemblée
Nationale et la DGSI s’alarment que, sous prétexte du terrorisme islamiste, on ait
réduit les moyens affectés à la surveillance de "l’ultra-droite" !
C’est vrai que c’est inquiétant…
Mais l’important, c’est l’agenda :
- du 6 juin (+ou-) au 6 juillet : Ramadan (avec un tas de visites à prévoir et éventuels
attentats padamalgam)
- du 10 juin au 10 juillet : Euro 2016
- Vers le 14 juin (pas avant) : Vote du Sénat sur la loi travail (pas de 49.3 au Sénat…)
- du 3 au 24 juillet : Tour de France
- le 6 juillet : Premiers grands départs en vacances (début des vacances scolaires)
- mi-juillet : vote définitif de la loi travail par l’Assemblée (avec ou sans 49.3…)
- 14 juillet : défilé, etc. (impératif que le Pédalonaute ait alors de quoi causer
et confirmer que ça-va-mieux…)
D’ici-là, faudra bien que ça se calme, qu’on ait de l’essence, toussa. Et aussi que CRS et gendarmes
mobiles soient sortis de l’hosto et n’aient plus à être au four et au moulin…
Bien sûr, les dépôts de carburant actuellement en stock sont libérés. Mais les processus industriels
étant ce qu’ils sont, qu’il s’agisse des raffineries ou des centrales
nucléaires, le redémarrage d’une unité à l’arrêt met huit jours pour être
productive. Et les ports d’importation de brut sont bloqués…
Et ni la CGT ni le gouvernement ne
peuvent se permettre de céder…
Pourtant, ne vous inquiétez pas ; ça va s’arranger. Oui, ça va s’arranger
car le Pédalonaute ne peut pas se permettre de voir foirer tout l’agenda. On va
donc trouver une solution pour que ni lui ni Martinez ne perdent la gueule. La sortie
de crise est déjà dans les tuyaux et ce sera une formidable arnaque qui va
entuber tout le monde à commencer par les salariés… mais que le patronat des
grands groupes va adorer :
Bien entendu, ça va consister à réécrire l’article 2 de la loi, dans une
formulation qui va satisfaire les apparatchiks syndicaux sans pour autant "inverser
la hiérarchie des normes" : Si
une commission paritaire de branche professionnelle juge que l’accord
d’entreprise comporte un risque de dumping social ou de concurrence déloyale,
les syndicats pourront appeler les délégués syndicaux concernés à ne pas signer,
sauf à se voir retirer leurs mandats.
C’est ce que suggère le rapporteur de la loi, appuyé par le président du groupe
PS à l’Assemblée…
Prenons l’exemple de la branche Travail Temporaire, oh combien créatrice d’emplois.
Elle se compose de trois ou quatre gros groupes et d’une foultitude de petites
entreprises. De fait, seuls les gros disposent des crédits d’heures permettant
d’envoyer des délégués, tant patronaux que syndicaux, dans les commissions de
branche.
On garderait donc le principe de
la primauté de l’accord d’entreprise. Mais ce dernier se trouverait alors
soumis à la censure préalable de la branche professionnelle en plaçant les
salariés signataires mandatés par la base sous la tutelle hiérarchique de leur
centrale syndicale ! Dans l’exemple ci-dessus, cela revient à donner à l’oligopole
des gros un pouvoir de fait sur le droit applicable chez leurs concurrents plus
petits qui tentent de leur tailler des croupières !
Bref, cette loi dite Travail avait d’ores et déjà été vidée de sa substance
mais tout n’est pas perdu. Cette nouvelle tentative désespérée (et peut-être vaine) pour isoler la CGT pourrait contribuer, non pas à
inverser la courbe du chômage, mais à renverser de fait la jurisprudence qui
réprime (semble-t-il,
ne nous avançons pas) les
cartels et les ententes…
Mais pour l’instant, on n’est toujours pas rendus…