Histoire de meubler
le désœuvrement d’un ouiquende sinistrement
ordinaire pas même troublé par les slogans qu’ânonnent trois pelés manifestant contre
l’état d’urgence sur la place d’à côté, l’envie m’a prise de ressortir des
réserves de mon musée perso et de raccrocher aux cimaises de céans deux "tableaux"
d’artistes inconnus. Il est vrai qu’ils ont déjà figurés,
il y a à peine plus d’un an, dans une de ces expositions temporaires que j’organise
parfois ici. Celle-là était intitulée "Tableaux d’une exposition" en
référence à l’œuvre pour piano de Moussorgski. Etant forcément (par nature
et destination) un "auditif",
il avait traduit en notes de musique ce qu’il avait ressenti lors d’une
exposition de peintures devant divers tableaux aussi différents que des
poussins sortant de leurs coques ou la majesté de la grande porte de Kiev…
Pareillement, moi qui suis un "visuel",
j’aime trouver des images pouvant traduire à mes yeux ce que j’entends… ou ce
que je pense dans ma tête. Il est vrai que si le résultat est probant pour moi,
mes fidèles lecteurs, aussi intelligents soient-ils, ont parfois du mal à
percuter^^ Mais bon…
Donc, voici ci-dessous le diptyque retenu aujourd’hui :
Comme tout bon critique, historien d'art ou conférencier
"expliquant" Jeff Kons à des touristes japonais, je me dois
évidemment de bavasser devant la chose pour tenter de vous convaincre du
pourquoi et comment le commissaire ploukèmien de l’expo a cru devoir
sélectionner ces deux œuvres figuratives et les réunir bizarrement dans un même
diptyque. Voici donc la notice du catalogue :
« Il s’agit, comme souvent en ce lieu, d’opérer par
contraste afin de "donner du sens et d’interpeller au niveau du vécu"
Ce diptyque porteur de sens nous interpelle avec bonheur en nous faisant
prendre conscience des progrès du vivre-ensemble et de l’extraordinaire enrichissement
en savoir-être réalisé dans l’âge scolaire en à peine deux générations. Vous
avez sous les yeux, en miroir dans le même espace visuel, le contraste
saisissant entre le "mouvement qui
prend son temps" heureusement révolu et le "bougisme immobile" que nous apportent enfin le principe de
précaution, le par-ce-que-je-le-vaux-bien, les "valeurs" et toutes
ces sortes de choses… Contraste. D’un
côté, encore tristement réduit au noir-et-blanc, vous avez ce mélange d’amitié
et d’émulation qui forgeait les petits d’hommes à le devenir à coup de
débrouillardise et de bouts de ficelle (notez le panier de basket) De l’autre, vous voilà rassurés. Nul
besoin de forger quoi que ce soit pour "être" ; la prothèse
manufacturée chinoise est là. Grâce à elle, assistanat premier, la jeunesse
pourra "être" quoi qu’il arrive. ; virtuellement du moins, mais
n’est-ce pas l’essentiel ?
Contraste ! D’un côté, vous aviez la fraternité
communautaire et la complicité virile. Inquiétantes dérives… De l’autre, voyez
comme l’aimable chacun-pour-soi remplit désormais l’espace et l’espèce dans l’éternel
présent sans souci d’avenir. Seul résidu des temps sombres qui surnage encore inconsciemment,
en dépit des efforts de Najat et de l’hermaphrodisme administratif, c’est la
séparation instinctive filles et garçons comme on ne le fait plus à l’église
depuis longtemps. Vous noterez accessoirement le désintérêt de tous pour la "Ronde
de nuit" de je ne sais plus quel grand peintre flamand. Mais il est mort
depuis si longtemps qu’il ne peut plus se vexer…»
Oualà, N'oubliez-pas le guide... Ni les honoraires du
conférencier..