Je n’avais
pas voulu traiter du fait "divers" surjoué à l’occasion des
prochaines fêtes johanniques si chères à la bonne ville d’Orléans. Pourquoi ?
En raison d’un malaise indéfinissable… Et la lecture du billet que vient d’écrire
mon amie Boutfil
sur le sujet me laisse toujours avec le même malaise. J’ai beau être
d’accord avec elle, il faut quand-même appeler un chat un chat… Au final, le
texte que j’ai trouvé à la fois le plus raisonné, équilibré et complet sur ce
psychodrame, c’est celui que Renaud Camus a écrit vendredi dernier dans son
journal. C’est long mais c’est comme ça :
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« Les réseaux sociaux ne bruissent que de
l’affaire d’Orléans, autour du choix d’une jeune métisse d’origine béninoise et
polonaise, Mathilde Edey Gamassou, pour incarner Jeanne d’Arc aux prochaines
fêtes johanniques. Il y avait là, pour les adversaires du changement de peuple,
un piège diabolique, évidemment. Ils se sont empressés d’y tomber, moi le
premier, car le moyen de faire autrement ?
Parmi ces
antiremplacistes la majorité ne trouve rien à redire, je le constate, à cette
innovation un peu forte, une Jeanne d’Arc noire, ou demi-noire : la jeune
fille est catholique, elle habite Orléans depuis longtemps, elle est
profondément attachée, nous dit-on, à l’héroïne nationale et à la France. Bien,
très bien : il n’est évidemment pas question — c’est encore trop d’avoir à
l’écrire — d’insulter si peu que ce soit cette jeune personne, de mettre en
doute sa sincérité, ou de lui causer le moindre chagrin, si du moins on peut
l’éviter. Il reste qu’il n’est pas possible non plus d’envisager cet épisode en
dehors du contexte politique, qui n’a pas grande importance, mais surtout du
contexte historique, démographique, ontologique : celui du
changement de peuple imposé, du remplacement ethnique, du génocide par
substitution. Voici que la Pucelle d’Orléans, d’héroïne de la résistance
qu’elle était, devient emblème du consentement, de la résignation, de la
soumission. Et encore il faudrait applaudir, remercier.
Toutes les
catastrophes qui ont été infligées à notre peuple depuis un demi-siècle l’ont
été par ce procédé simple, et d’une efficacité sans pareille : obliger
l’adversaire, s’il entend protester contre elles, à tenir l’emploi du
méchant — que personne ne souhaite assumer, évidemment : qui veut
chagriner Mlle Gamassou ? qui veut jouer le rôle de l’affreux
raciste ? C’est à quoi tout opposant est contraint, pourtant, à moins
qu’il ne se résigne à se taire, et à accepter le fait accompli, dès lors qu’à
la jeune Mathilde échoit le rôle de Jeanne d’Arc. Or c’est là, d’évidence, une
étape décisive dans l’effacement du peuple français, dans l’éradication de sa
mémoire, dans la suppression de tout lien charnel entre sa pauvre existence
d’aujourd’hui et ses aïeux, qui sont à peu près tout ce qui lui reste.
Tous les
vertueux ont répété à l’envi, toute la journée, la bonne doctrine, et l’article
de catéchisme afférent : « être français, ce n’a jamais été une couleur de
peau ». Or il faut avoir le courage de l’assumer, avec quinze, vingt ou trente
siècles de l’histoire de ce territoire, dès avant qu’il ne s’appelle
France : bien sûr que si, c’est une couleur de peau. Ce ne l’est
pas exclusivement, bien entendu, c’est bien autre chose aussi, ce peut
aussi ne pas l’être, il y a de nombreuses exceptions, mais elles restent des
exceptions, car ce l’est es-sen-ti-el-le-ment. De Gaulle a dit là-dessus
tout ce qu’il y avait à dire, comme souvent ; et sa phrase fameuse est
plus que jamais d’actualité, selon laquelle c’est très bien qu’il y ait des
Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns, mais à condition
qu’ils restent une petite minorité
« Sinon, la
France ne serait plus la France ».
Pour ma part
je n’en démords pas.
Pareille
conviction est allée absolument sans dire pour tous nos aïeux sur des dizaines
de générations, jusqu’aux deux ou trois dernières. Elle est d’ailleurs, mutatis
mutandis, celle de tous les peuples de la terre, et notamment de ceux qui sont
en train de nous remplacer, et qui ne peuvent le faire qu’à raison de notre
silence. C’est ce silence qui nous livre. C’est ce sans dire qui nous
perd, car il est exploité contre nous par les envahisseurs, bien sûr, mais
d’abord, et surtout, plus cyniquement, par les omniprésents lobbyistes de
l’industrie de la MHI. Il ne reflète à la vérité qu’une évidence si forte et si
partagée que nul n’aurait seulement songé, aussi longtemps que la France fut la
France, à la traduire en mots. Mais à présent qu’elle ne l’est plus, ou si peu,
et si mal, ce sans dire est interprété et présenté, de la façon la plus
mensongère, par ceux qui veulent à tout prix noyer les Français dans la pâte
humaine universelle, comme un consentement doctrinal, consubstantiel à la nation.
Pour faire
disparaître les races et les peuples, l’antiracisme est bien plus efficace que
le racisme. Le remplacisme ne s’y trompe pas, d’ailleurs, qui l’a choisi comme
allié privilégié, jusqu’à se confondre avec lui. Ils ont compris qu’un vrai
génocide, pour être efficace et mené jusqu’à terme, ne saurait être accompli,
désormais, qu’au nom du bien : c’est la condition nécessaire pour
obtenir le soutien indispensable des génocidés — qu’il importe de convaincre,
non seulement qu’ils n’existent pas, mais qu’ils n’ont jamais existé :
d’où la formidable campagne actuelle pour mettre des arabes et des noirs
partout, non seulement dans tous les coins et recoins du territoire, par le
truchement du prétendu “logement social’, et par le biais de la redistribution
des non moins prétendus “réfugiés”, mais dans tous les coins et recoins des
siècles, aussi bien, de l’histoire et de la littérature : qu’il s’agisse
des chevaliers de la Table ronde, des Trois Mousquetaires ou des courtisans de
Louis XV. Avec Jeanne d’Arc, un pas décisif de plus est franchi. Bientôt on ne
pourra plus distinguer Napoléon de Roustan.
Le défi qui
nous est lancé, d’ailleurs, doit être considéré de façon plus large encore,
philosophique, presque métaphysique. Il s’agit toujours, en conformité avec les
caractères fondamentaux du remplacisme global — cette haine de l’être —, et
selon les pulsions constantes de la modernité prométhéenne, de refuser le
donné, le déjà-là, l’acquis, l’irréversible ; et de jeter à la face des
dieux que l’homme est tout-puissant, même sur le passé : pourquoi les
géants en surpoids ne pourraient-ils être jockeys, les personnes de petite
taille basketteurs, les hommes enceints, les homosexuels mariés (ensemble) et
pères de famille ; et pourquoi les blancs ne pourraient-ils incarner
Mandela ou Martin Luther King, et les noirs figurer Jeanne d’Arc ? Qui dit
que ce doive être une femme, d’ailleurs ? Pourquoi ne serait-ce un
garçon ? Je suis sûr que les statuts des fêtes johanniques n’ont même pas
songé à l’exclure…
Mlle Gamassou
doit bien s’en convaincre, et ceux qui nous accusent d’humilier Mlle Gamassou
doivent bien le comprendre : ce n’est pas une humiliation, de ne pouvoir
incarner Jeanne d’Arc. On me dirait que je ne peux pas incarner Anne Frank, ou
Nelson Mandela, je ne le prendrais pour une insulte personnelle. Et je
trouverais fort niais de consacrer ma vie à bien prouver que si, je le peux, ou
à devenir critique musical, si j’étais sourd, ou peintre, si je n’avais pas de
bras, ou contrefait et monstrueux, si j’étais très beau et très bien bâti :
c’est tout ordonnancer autour d’une impossibilité, se laisser obséder par elle,
au lieu d’exploiter le champ du possible, et d’y fonder sa liberté.
Le
remplacisme global est bien l’enfant de mai 68 et de la révolution petite-bourgeoise.
Il s’interdit de s’interdire. Tout lui est bonheur de ce qui abolit les
frontières, les empêchements, les distinctions, les limites, qu’elles soient
géographiques, conceptuelles ou morales. Rien de ce qui est ne l’entrave. Il ne
veut surtout pas d’héritage, ce facteur d’inégalité, de discrimination,
de grumeaux. Il est toujours prêt à tout reprendre au début : d’autant que
le passé n’est jamais bien profond, à ses yeux, ni le futur bien distinct. Tout
lui est présent, rien ne lui est présence. Que les choses soient, voilà
ce qui lui est intolérable : et surtout qu’elles soient ce qu’elles sont. Être
lui semble une prétention abusive, et surtout qu’il comprend mal. Ce n’est pas
dans sa culture, comme il dit. Il échange, déconstruit, subtilise, remplace.
L’important est que les usines tournent vingt-quatre heures sur vingt-quatre,
que la MHI soit livrée, que ceux qui l’ont produite l’achètent, et ainsi se
dévorent eux-mêmes. »
Renaud Camus
Plieux, vendredi 23 février 2018, minuit.
Plieux, vendredi 23 février 2018, minuit.
NDLR : Pour les non initiés, MHI = "Matière Humaine Indifférenciée"...