Oui, que la France était belle quand
les juges sortant de leur école de Bordeaux savaient encore écrire !
Certes, ça faisait déjà plus d’un an
que le Mythe Errant avait rallumé la lumière. Mais quand-même ! Par
sa vitesse acquise, le radeau, tout médusé qu’il fut, courait encore sur son
erre dans un vivre-ensemble désormais révolu et sans devoir encore codifier les
cinq fruits et légumes par jour.
Saurait-on encore aujourd’hui, sous la
houlette de Mam' Taubira, rédiger d’aussi savoureuses petites choses comme il y
a trente-trois ans ? Presque une éternité…
Jugement prononcé le 13 octobre 1982
par le Tribunal correctionnel de Chalons-sur-Marne sous la présidence du bon
magistrat M. Gelle :
« -
Attendu qu'il appert des pièces de la procédure, des débats à l'audience et des
déclarations de N. que Dlle D., lors âgée de 17 ans et demi, servait des
boissons dans l'auberge dont la femme R. était la tenancière, lorsque, sur le
minuit, arrivèrent quatre hommes et deux filles ;
que le
sieur N., à l'époque âgé de 18 ans et 3 mois, qui était parmi ceux-ci, convia
la mineure à la danse et, envisageant ses attraits, fit d'icelle prompte
conquête ;
qu'enhardi
par l'absence de toute barrière que la jouvencelle eut pu dresser contre
son entreprise et même conforté par l'accueil sans nuance qu'elle réservait au
projet de son fier vainqueur, N. ne balança point à rechercher ses grâces
secrètes et ses faveurs ultimes ;
que Dlle
D.les lui prodigua d'ailleurs sans différer aucunement ni les restreindre
davantage ;
que
cependant, dame B., ci-devant Joséphine D., instruite dans le même temps
de l'aventure et mue par le désir tardif de préserver sa fille d'une
atteinte qu'elle croyait peut-être originelle mais qui n'était que nouvelle, la
mineure ayant en effet déclaré aux procès-verbaux qu'un
tiers avait déjà bénéficié de ses suffrages trois mois auparavant, vint heurter
à la porte du logis où s'étaient retranchés les amants, interrompant ceux-ci en
leurs ébats avant même qu'ils en eussent atteint le sommet ;
- Attendu que le sieur N. bien qu'il
ne laissât point de confesser la connaissance entière qu'il avait de l'âge de
la donzelle, fait néanmoins plaider aujourd'hui sa relaxe au motif pris de ce
qu'il n'aurait pas eu la volonté durable de la soustraire à la parentale
autorité ;
- Attendu, en droit, que si le délit
d'enlèvement ou de détournement de mineure est constitué nonobstant l'adhésion
que la victime ait pu y mettre, pour ce qu'un mineur, en effet, ne peut point
valablement consentir, encore faut-il qu'il existe chez son auteur un élément
intentionnel consistant en la conscience d'une part, de soustraire ledit mineur
des lieux où l'avaient placé ceux à l'autorité ou à la direction desquels
il était soumis ou confié et, d'autre part, de l'en retirer d'une manière sinon
définitive, en tout cas durable ;
- Et attendu qu'en la cause, il n'est
pas certain que le prévenu N. eût d'autres desseins que de satisfaire à une
impétuosité momentanée devenue fugitive dès son assouvissement; que dès lors,
non seulement n'est établie à son encontre nulle intention de ne plus
représenter la mineure, mais que, de surcroît, la preuve n'est pas rapportée
que le détournement se fût prolongé au-delà du temps habituellement
nécessaire à l'apaisement d'un désir d'autant plus vivement consumé qu'il était
ardent.
- Attendu qu'il n'est donc point en
l'espèce de rapt de séduction ;
Et considérant que le fait
poursuivi ne saurait recevoir aucune qualification pénale ;
Par ces motifs, statuant publiquement,
contradictoirement et en premier ressort, relaxe Stéphane N. des fins de la poursuite
sans peine ni dépens". »
Ce sera tout pour aujourd’hui.
oh dis donc ! les temps ont bien changés ! c'est beau comme du Molière
RépondreSupprimerBravo !
RépondreSupprimerSi la belle langue et la belle écriture t interessent, achète le dernier bouquin de notre ami Rémi Les enfances de Charlemagne que je suis entrain de lire, c'est exclelent
RépondreSupprimerJe me suis offert ça pour Noël.
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