Si ce cher Mélenchon nous bassine avec sa VI°
République, nombre de commentateurs et analystes autorisés n’arrêtent pas de
nous annoncer que notre actuelle République ne
sera plus jamais comme avant. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils
ont raison, il ne s’agit pas seulement d’un effet de mode passager. Quel qu’il
soit parmi les trois ou quatre candidats aspirant vraiment à la fonction, le futur président de la Gueuse ne
bénéficiera plus du respect (même purement formel) dû à sa
fonction ni de l’excès d’autorité qui en découle. Même le seul d’entre eux
susceptible de disposer d’une majorité parlementaire plus ou moins cohérente et
stable (François
Fillon, n’ayons pas peur des mots) sera dans
cette situation tant on lui a savonné la planche. C’est aussi le seul capable d’assez
d’intelligence pour faire évoluer efficacement la fonction dans le bon sens.
Mais ce n’est pas de ça que je veux parler.
Cette histoire de changement sinon de Constitution du
moins de façon de gouverner, me ramène à la question lancinante : Gouverner c’est quoi ? Pour
Hollande, gouverner c’était communiquer ;
puis, comme communiquer nécessite quand-même d’avoir quelque chose à dire,
gouverner devint simplement commenter
ce qui ne dépendait pas de lui. Si gouverner c’est faire, c’est agir, Gouverner c’est agir sur quoi ?
Et on en revient forcément au nerf de la guerre. Quels
que soient les objectifs programmatiques choisis, gouverner c’est les mettre en
œuvre, c’est définir des priorités et orienter en conséquence les dépenses
publiques !
Et ça me donne envie de vous recopier ci-dessous l’essentiel
d’un mien billet d’il y a trois ans (pas mis à jour pour les chiffres…) :
Ah le poids des dépenses publiques ! "Chez
nous", il absorbe dorénavant 57% du Produit Intérieur Brut et la petite
bébête continue de grimper, grimper…
Une fois qu’on a dit ça, on n’a rien dit de la nature de la dépense publique. A la
louche, il y a là-dedans deux grandes catégories de dépenses : celles qui
relèvent de ce qu’on appelle les missions
régaliennes de l’Etat et… le reste.
- Dans le régalien,
on trouve tout ce qui relève de la Défense, la Police, la Justice et la
Diplomatie…
Dans le reste,
d’une part, il y a tout un inventaire à la Prévert de monopoles, combinats,
offices de tutelles, etc., qui vont des hôpitaux et des écoles à
l’administration des Monnaies et Médailles et à l’Institut du Monde Arabe…
- Bien sûr, il y a là-dedans une fraction des dépenses
qui relèvent du quasi-régalien : On n’est plus sous Louis XIV et la
collectivité doit logiquement garder un œil pour la cohérence d’ensemble sur
certains domaines, qu’il s’agisse de "l’instruction publique" (plus que de "l’éducation nationale"), de normes sanitaires ou de ce que je qualifierais
de "Voierie-Réseaux-Divers" (réseaux d’infrastructures, routier, ferroviaire,
d’énergie, de flux numérique, régulation aérienne…) Mais entre orienter et contrôler ou… faire soi-même
il y a de la marge.
- Et d’autre part, il y a l’Etat Providence qui, comme
Maman, fait lui-même à la place de
ses chers petits, que ce soit soigner, enseigner, ramasser les poubelles,
définir la hauteur des appuis de fenêtres…
- Enfin, il y a les transferts sociaux, l’énorme essoreuse à salade qui ventile les
sous au titre de ce qu’on appelle le modèle
social français (dont je n’ai
pas trouvé la définition se réduisant à aucune autre et je m’en excuse)
Pourquoi vous causer de toussa que vous savez déjà ?
A cause de la répartition de cette foutue dépense
publique entre le régalien et le reste. Et de son évolution :
- En 1960, dépense publique à 35,0% du PIB :
6,5% pour le régalien et 28,5% pour le reste.
- En 1990, dépense publique à 49.5% du PIB :
4,5% pour le régalien et 45,0% pour le reste.
- Aujourd’hui, on en est à 57% du PIB : 2,8%* pour le régalien et 54,2% pour le reste…
* Ces 2,8% se décomposant ainsi : 1,6% pour la
Défense, 0,7% pour la Police, 0,3% pour la Justice et 0,2% pour la Diplomatie…
Pour ce qui est du reste,
il est incontestable qu’une large partie de son contenu pourrait, le cas
échéant, relever d’opérateurs privés et, dans bien des cas, avec une meilleure
efficacité et qualité du service rendu.
En revanche, qui
pourrait imaginer un pays qui resterait un Etat de droit en n’étant doté que
d’armées privées, de polices ou milices privées, de justice privée et d’une
diplomatie confiée au pas forcément moins disant sur appel d’offre à quelque
ONG ou société de services ? (bon, ok, c’est déjà le cas sans que je sache trop si
c’est à Goldman Sachs ou au Département d’Etat…)
C’est formidable ! Le dépérissement de l’Etat
dont les vieilles barbes Marx et Engels avaient rêvé dans leurs divagations les
plus folles, le modèle social français™,
avec son vivre ensemble™ et son rêve métissé d’un éternel futur© est en
voie de le réaliser sous la houlette de Macron et Cie !
Au rythme de régression de la part du PIB consacré au
régalien observé de trente ans en trente ans, dans une génération, disons en
2045, on ne consacrera plus que moins de 1% du PIB au régalien. Tout juste de
quoi entretenir les ors, les bagnoles de fonction et gardes du corps d’une
potiche quelconque conservée pour "avoir l’air de…". L’Etat - de
droit ou pas - aura enfin disparu !
Et, la nature ayant horreur du vide, il y aura quoi à
la place ? Peut-être quelque chose
comme une sorte de multinationale
humanitaire croyant naïvement gérer sur le papier des distributions
symboliques de rations de survie à la tête du client et la reconnaissance, au
titre du fait accompli, des droits de prédation que se seront appropriées des
mafias locales…
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire