Non, je ne vais pas refaire en moins bien les
billets d’indignation ou de constat navré de mes potes sur la sauterie imprévue de samedi à Nantes. Ni chercher
à affiner les excellents comparatifs statistiques de notre ami Corto.
Ni imaginer la suite du psychodrame éphémère Ayrault-Duflot, il n’y en aura pas
avant les élections. Ni évaluer la dose non létale de stéroïdes que peut encore
prendre Manuel Valls pour muscler ses mandibules. Non. J’ai juste jeté un œil
sur le vocabulaire utilisé à cette
occasion. Jeté un œil sur les mots
choisis… ou omis.
Ah ! Manuel ! Ses discours, communiqués, propos
de tribune et jactances diverses pourraient peut-être faire un sujet de thèse de
sémantique. Il est vrai que son lexique est assez pauvre. Le nombre de mots
utilisés est somme-toute limité et ceux-ci sont toujours piochés dans les mêmes
tiroirs. Mais tout l’intérêt des sécrétions verbales du locuteur réside dans sa
façon d’utiliser ou non les mots et de les agencer dans leurs relations les uns
aux autres. En général de façons différentes en des circonstances comparables
et de façons comparables en des circonstances différentes. Vous me direz que c’est
là banalement la marque du politicien
chevronné.
Pourtant, si ce grand savoir-faire dans le ministère de la parole comble d’aise le mercenaire
pourvoyeur en signes et espaces des médias en lui donnant de quoi meubler pour pas un rond, le résultat concret au stade de la
consommation finale se résume à une sorte de bruit de fond qu’on fait avec la
bouche.
Il y a donc là matière à s’interroger et un chercheur universitaire en panne d’idée
pourrait avec ça étoffer pour pas cher sa bibliographie de publications
académiques. Mais je m’égare…
NDDL, donc. Manuel en cause, forcément.
Passons sur : "[action] inadmissible qui continuera
à trouver une réponse particulièrement déterminée de la part de l’Etat " etc. Là, on est dans le blabla générique habituel.
Voyons plus en détail :
Manuel Valls a
exprimé sa crainte que «des groupes
isolés continuent cette guérilla urbaine». «Cette violence venant de cette ultra-gauche,
ainsi que des Black Bloc, très violents, qui sont originaires
de notre pays mais aussi de pays étrangers »
«manifestation transformée
en véritable guérilla urbaine échappant totalement à ses organisateurs» Etc.
- Déjà, il ne s’agit
pas comme souvent d’affirmer une certitude mais seulement d’exprimer une crainte…
- On notera l’insistance
à parler de groupes isolés,
expression jamais utilisée pour "JDC" ou "LMPT".
- Surtout, l’expression
ultra gauche n’est jamais couplée avec
extrême-gauche. En d’autres
circonstances, les rengaines "extrême-droite
et ultra-droite" et "droite
et extrême-droite" n’arrachent pourtant pas la gueule du locuteur.
- Les Black Bloc gagnent enfin leur titre de
noblesse ! "Ainsi que" ces individus... Ignorés jusqu’à présent
par la grande majorité des acurabas,
ils évitent avantageusement d’évoquer les Antifas
et autres anarchistes qui, hier encore, suivis (et non pas précédés) par CGT, Front de
Gauche et PCF, battaient le pavé lyonnais, masqués et avec manches de pioches
en scandant "Pas de fachos dans nos
quartiers, pas de quartier pour nos fachos"… Manuel ne désigne pas à
la vindicte citoyenne les potes de ce
pauvre Meric. D’ailleurs, il a dit samedi soir qu’il ne voulait "surtout
pas faire des amalgames"…
- On notera aussi que
ces Black Bloc étaient très violents.
Manière de préciser que les autres ne l’étaient (sans doute) pas… Et,
curieusement, il était besoin d’indiquer "qui sont originaires de notre pays", précision inutile, évidemment, dans des circonstances comme
celle du Trocadéro…
- Et puis, la manifestation "a totalement échappée
à ses organisateurs". Qu’on
se le dise.
En bon répétiteur, Libé-qui-n’en-a-plus-pour-longtemps a d’ailleurs cru
bien faire en écrivant :
«La fête est
gâchée, les organisateurs sont débordés par la frange radicale sur
laquelle ils s’appuient depuis le début de ce mouvement» In cauda venenum…
Lesquels
organisateurs ont déclaré par la voix de leur porte-parole :
«Peu importe ce que
dira la préfecture, pour vous tous et toutes c’est un grand succès» en se plaignant que
la manifestation ait été «coupée
par une intervention des forces de l’ordre»…
Une dernière
curiosité est à relever : Manuel s’est attardé avec complaisance à
énumérer les exactions commises. Il a parlé d’incendies, de flics blessés, de
boulons, de cocktails Molotov, de destructions, etc. Pas une fois, il n’a
évoqué l’antienne si souvent entendue contre « tous ceux qui s'en prennent à nos institutions et nos valeurs »…
Il est vrai qu’en d’autres
circonstances il n’avait même pas un abribus à se mettre sous la dent pour
meubler son temps d’antenne…
Enfin, il aussi affirmé
samedi soir :
"Moi j'ai en
charge la sécurité des Français. C'est ma tâche quotidienne (…) Je suis cohérent, je suis responsable et
cette cohérence et cette responsabilité, chacun doit la partager"
?? Pourquoi ce Moi
je ? C’est son job, on le sait. C’est quoi cette sortie comme un cheveu
sur la soupe pour nous persuader de sa cohérence
et de sa responsabilité,
responsabilité que nouzôtres devrions partager porter ?
Trépignement, envie de pisser et fin de rêve du type les
pieds dans l’eau qui perçoit le glouglou annonciateur de l’inéluctable engloutissement
du radeau de la Méduse ?
Belle analyse. En particulier sur "groupes isolés".
RépondreSupprimerCeci dit, il apparait évident que a Nantes police, renseignements généraux et préfecture ont été en dessous de tout.