Compte tenu de la
commémorationite proliférante aigüe qu’on nous inocule à tour de bras, je me
doutais bien qu’il devait y avoir quelque
part un comité Théodule, fromage subsidiaire, en charge d’en établir le
calendrier. C’est bien le cas.
Le "Haut Comité des commémorations nationales" qui
dépend du Ministère de la Culture vient donc de rendre public la liste
officielle de la centaine de "commémorations d’anniversaires susceptibles
d’être célébrés au nom de la Nation en 2018". Or, figurez-vous qu’on
trouve dans le lot le 150° anniversaire de la naissance de Charles Maurras !
- Aussi sec et comme de bien entendu, la LICRA et SOS
Racisme ont crié qu’on les égorge et orchestré sur les réseaux sociaux une
levée générale de bouclier émanant, n’en doutons pas, de guignols n’ayant
jamais entendu parler de ce barbichu natif de Martigues qui est décédé il y a 65
ans.
- Du coup, se réveillant de sa sinécure et ne pouvant
être en reste, le Préfet (oui, faut un
préfet pour ça) qui dirige la "Délégation
interministérielle à la lutte contre le racisme, l'antisémitisme et la haine
anti-LGBT" (Dilcrah, ça existe aussi) s’est
fendu d’un "Maurras, auteur antisémite d'extrême droite, n'a pas sa place
dans les commémorations nationales !"
- Bien évidemment, les
fonctionnaires du ministère se sont excusés/défaussés en communiquant : "La ministre s'appuie sur un travail d'historiens
qui recensent des anniversaires clés de l'histoire de France. Il ne s'agit
évidemment pas de célébrer le penseur de l'extrême droite qu'était Maurras,
mais au contraire de connaître son rôle dans l'histoire de France"
Mais tout aussi évidemment, la Sinistre de la Kultur
ne saurait prendre aucun risque. Ayant finalement rayé Maurras de la liste,
elle a rappelé hier avec fermeté "son
rejet total des thèses et de l'engagement de Maurras"
Rappelons brièvement qui fut
Charles Maurras que tous les "jeunes de moins de 75 ans" n’ont pu
connaître :
Essayiste, homme de presse, littérateur très
diversifié, poète, polémiste et homme politique, passionné d’histoire, de
littérature et de philosophie, il exerça
pendant un demi-siècle une très grande influence sur la vie
intellectuelle en France et de nombreux écrivains ou hommes politiques ont subi
son influence sans nécessairement se réclamer de lui. Avec
plus de dix mille articles publiés entre 1886 et 1952, il fut le journaliste
politique et littéraire le plus prolifique de son siècle. Parallèlement à une œuvre littéraire dédiée à la
Provence et à son amour pour la Grèce et l’Italie, il devint le maître à penser
des monarchistes avec la création du journal l’Action Française
et du mouvement politique du même nom. Le canard était alors influent et d’un
très haut niveau culturel. Soutenant à fond l’effort de guerre contre
l’Allemagne en 14-18, contestant avec violence le régime de l’entre-deux-guerres,
condamné par le Vatican en 1926, pétainiste pendant l’occupation, il a été
condamné en 1945 à la réclusion criminelle à perpétuité pour Haute Trahison et
automatiquement exclu de l’Académie Française (ses pairs, curieusement, ont laissé son siège vide
jusqu’à sa mort) Il mourut à 84 ans, en résidence
surveillée dans une clinique où on l’avait discrètement expédié quelques mois
plus tôt, histoire qu’on ne dise pas qu’il était mort en prison (on l’y avait envoyé à la "Libération",
à 77 ans…)
A titre anecdotique, pour situer le peu de place que
ce penseur à eu dans l’Histoire de France, Wiki-sa-race
n’a pu faire moins que de lui consacrer un article de 30 pages écrans (11 seulement pour Jean-Jaurès)
Mais bon, il
importe que les esprits ne soient pas perturbés en risquant de découvrir qu’au temps
des HLPSDN, la vie politique et la société étaient moins duales que complexes.
Et, surtout, qu’elles étaient vivantes !
Pour veiller
à la santé mentale du peuple, nous avons un "Haut Comité des commémorations nationales" et c’est une
chance. Il fait son travail et il le fait bien. La preuve, c’est même écrit
dessus :
Le ministère
présente le recueil annuel des commémorations comme étant :
"Un outil quotidien pour suivre l'actualité et réviser
l'histoire" **
** J'imagine ce qu'ils voulaient dire, mais le choix des deux verbes à l'infinitif me fait l'effet d'un acte manqué...
"Réviser l'histoire", cela n'a évidemment rien à voir avec réviser un cours d'histoire comme on le faisait dans les temps anciens - heureusement révolus ! - c'est la "revisiter", comme on dit aujourd'hui, on effaçant autant que possible ce qui doit être effacé, et en mettant en exergue ce que l'on ne doit surtout pas oublier, selon les critères de la bien-pensance.
RépondreSupprimerEt "suivre l'actualité", en gros, c'est s'intéresser - pour approuver - à ce que fait macron et ses marcheurs.
Il faut bien un préfet pour s'occuper de tout ça, pas vrai ?