J’admets volontiers
que ma lecture de la théologie chrétienne est peut-être un peu borderline, mais je m’y raccroche comme
l’arapède à son rocher… Si la Création
est toujours en train de se faire, il n’en demeure pas moins que, passé le 7°
jour, le Patron Dieu a fini par se lasser d’enfiler Révélation sur Révélation
dispensées à des gus pas toujours réceptifs. Il nous a donc refilé le bébé via
l’Incarnation : saut qualitatif
considérable ! Depuis lors, chargés de faire le job sans être Dieu, nous engendrons
mais ne créons pas et il est juste de
dire :
"Rien ne se
crée, Rien ne se perd, Tout se transforme"
Où je vais, là ?
– Ah oui ! "Rien ne se perd, Tout se transforme" Toussa pour
rappeler une fois encore que, contrairement à ce qu’un vain peuple pense, l’Ancien Régime est toujours bien vivant !
Tant il est vrai que les Trois Ordres
(Noblesse, Clergé et Tiers-état) sont une constante récurrente, constitutive du
lien social, quasi consubstantielle au
vivre ensemble de l’espèce humaine…
Bref, les Trois Ordres ont toujours
existé mais ne cessent de se transformer. J’avais déjà évoqué cet état de fait ici mais
sans trop entrer dans le détail et sans suffisamment insister sur la régression et l’indice de retour à des
temps protohistoriques, préhistoriques, primitifs et barbares que suggère le
rôle de plus en plus dominant et
irréfutable du Clergé dans la société…
Et voilà que je lis
sur Causeur, une contribution d’Aude de Kerros particulièrement éclairante
sur l’évolution des clergés en charge de dire
le bien en notre douce France. La voici :
"La France est un pays
remarquable par le nombre et la puissance de ses clergés. Curieusement elle a
connu ces trente dernières années une révolution cléricale dont l’histoire
n’est pas connue. L’observation de ce phénomène n’a cependant pas échappé à
quelques sociologues et essayistes avisés et courageux.
Le Pays aux cinq clergés
En voici le répertoire.
- Les clercs des comités de
rédaction président à la mise en gloire des saintes reliques et des objets
sacrés, ils bénissent les bons et condamnent les méchants.
- Les universitaires, quand ils n’ont pas atteint l’âge de la retraite, c’est-à-dire de la liberté, fabriquent l’histoire sainte et élaborent la doxa.
- Les magistrats jugent de plus en plus comme Dieu lui-même et non plus selon le Droit.
- Les fonctionnaires de la culture, notamment les « inspecteurs de la création », prononcent les mots de la consécration : « Ceci est de l’art, celui-ci est un artiste ».
- Le clergé d’Eglise, pillé de toutes ses fonctions sacerdotales y perd son latin.
- Les universitaires, quand ils n’ont pas atteint l’âge de la retraite, c’est-à-dire de la liberté, fabriquent l’histoire sainte et élaborent la doxa.
- Les magistrats jugent de plus en plus comme Dieu lui-même et non plus selon le Droit.
- Les fonctionnaires de la culture, notamment les « inspecteurs de la création », prononcent les mots de la consécration : « Ceci est de l’art, celui-ci est un artiste ».
- Le clergé d’Eglise, pillé de toutes ses fonctions sacerdotales y perd son latin.
Il s’est produit du même
coup des transferts de sacré fort complexes. Les églises sont devenues des
lieux de monstration des saints artistes ayant reçu l’onction de l’Etat. Les
commissaires y prêchent un nouvel humanisme et initient aux concepts
hermétiques. Les médias chantent les louanges et fabriquent auras et tabous.
Les universitaires écrivent l’hagiographie des saints. Les juges disent le
Bien.
La laïcité républicaine est
décidément bien mal en point. La gauche est plus tentée par la fonction
cléricale que par la représentation du peuple. Quant aux élus de l’Assemblée
Nationale, ils ont voté une multitude de lois contre le blasphème qui ne
punissent pas les crimes avérés mais les mauvaises pensées.
Culpabiliser c’est régner
Mais qui sont leurs
victimes ? Ce sont tous des hommes du faire et de la création. Les artistes,
les écrivains, les chercheurs en premier lieu. Ils n’ont jamais eu autant de
clercs sur le dos. Ceux-ci leur font la morale, jouent sur la culpabilité.
Toute approche du beau, de l’harmonieux, de l’élégiaque est un péché. Pour être
sauvés, il leur faut déconstruire, transgresser, mettre en abîme. Les clercs
sont unanimes pour considérer en France que la « beauté » et le « glamour »
sont réservés à la pub, la consommation et la déco.
Il y a aussi tous ceux qui appartiennent au « tiers état » : les hommes du faire, du commerce et de l’industrie, les personnes qui entreprennent, produisent, créent des biens, aiment être libres, indépendants, courir des risques, ne pas être assistés. Les clercs les ont à l’œil, de préférence les petits et les moyens car les grands sont leurs mécènes… !
Il y a aussi tous ceux qui appartiennent au « tiers état » : les hommes du faire, du commerce et de l’industrie, les personnes qui entreprennent, produisent, créent des biens, aiment être libres, indépendants, courir des risques, ne pas être assistés. Les clercs les ont à l’œil, de préférence les petits et les moyens car les grands sont leurs mécènes… !
Ils exercent leur pouvoir
sans contre-pouvoir, avec discrétion, au fond des sacristies. Depuis une
dizaine d’années leur puissance connaît une ombre : Internet. On y parle d’eux,
on les observe, on les brocarde. Les chroniques
artistiques de Nicole Esterolle [x] sont un modèle du
genre, une illustration du phénomène. Elles sont diffusées à tout le milieu de
l’art, du fonctionnaire de la rue de Valois, aux galeries, journalistes,
critiques d’art, historiens, artistes et amateurs. Ainsi tout le monde rit du
ridicule absolu des situations, de la confusion des genres, de l’indigence de
la doxa et des aspects plus bassement matériels mais si déterminants ! Rien de
mieux que l’observation des faits pour surmonter la stupéfaction et l’effroi
que provoquent l’incompréhensible et le sacré. Or, il y a aujourd’hui un fait
nouveau : la gauche au pouvoir en 2012 est une souveraineté cléricale, elle a
mis à son service tous les clergés à la fois. C’est la mort de la laïcité, le
triomphe du nouveau sacré !
Les hommes libres de gauche
et de droite s’en inquiètent; n’oublions pas que le destin de toute
civilisation passe par la liberté de créer et d’entreprendre !"
Aude de Kerros est graveur,
essayiste. Elle vient de publier « Sacré Art contemporain- Évêques, inspecteurs
et commissaires», Ed. Jean Cyrille Godefroy.
[x]
Les chroniques de Nicole Esterolle sont
désormais consultables via ma colonne de droite (forcément de droite) rubrique "divers" :
"L’art chez le schtroumpf émergent". Pour qui s’intéresse au lard
à l’âart, c’est une mine !
On va regarder les chroniques de Nicole.
RépondreSupprimerMerci !
Sinon :
"Il nous a donc refilé le bébé via l’Incarnation" , j'aime bien ^^
Sur le reste:
je pense que c'est trop "gentil" de voir dans ce qui nous accable la manifestation d'une simple transformation-adaptation des 3 états naturels de la société humaine. Comme si c'était jouable et viable.
C'est pire que ça.
Il y a installation de forces qui tendent à la destruction plutôt qu'à la mutation, avec des zélites qui tentent momentanément et vainement de planquer leurs arpions en pactisant avec le diable, sans souci de notre chute vers le néant vaste et noir.
Ca leur retombera évidemment sur le nez tôt ou tard, avec effet rétroactif. Mais nous aurons déjà plongé.
Du coup, je suis allée lui mettre un mail de soutien, tiens…
RépondreSupprimerAvec mon serpent de mer en (sub)prime.
Je ne sais pas s'il va passer parce que j'ai mis un lien.
Allez savoir lequel ^^