Pour
faire une suite au billet d’hier, en pensant (en passant) au principe de précaution, à la disparition
de la faute à pas de chance au profit
des assurances responsabilité pénale
professionnelle, à la signature avant de passer sur le billard de décharges par les patients prêts à
clamser, et toutes ces sortes de choses, je vais vous raconter un moment presque quelconque de la vie de
Mme Plouc.
Ce
devait-être en 1974, je crois. Une époque où nous n’avions encore qu’un môme à
la crèche et où l’on s’employait à mettre
de l’argent de côté pour la suite… Infirmière aide-anesthésiste, Mme Plouc
bossait à l’hosto de la ville d’alors (un CHU de moyenne importance) où elle
partageait son temps entre l’anesthésie en bloc opératoire et des astreintes
hebdomadaires pour le SAMU, de jour comme de nuit, en ambulance comme en
hélico… Et elle accumulait les récup’ d’heures sup’ non payées… Qu’en
faire ?
On
était dans une des régions les plus sous-médicalisés de France et les petits
hôpitaux ruraux où il ne se passait jamais rien couraient toujours après les
remplaçants pour boucher les trous laissés par les congés…
C’est
ainsi que son "patron" proposa à Mme Plouc d’aller dépanner l’hosto
d’une sous-préfecture de 9 000 habitants que se trouvait sans anesthésiste
de garde pour le pont du quinze août.
Banco ! Le Plouc-em’ gardera le môme et ça fera toujours trois sous qui
rentrent…
Hosto
à la Zola quasi désert… Après s’être fait montrer le matos par la fille de
garde qui aurait visiblement aimé être ailleurs ce jour-là, avoir vérifié la
pharmacie disponible, tâté le matelas de la piaule d’astreinte et sorti un
bouquin, y’avait plus qu’à attendre que ça se passe… Ouais…
Sonnerie…
Urgence…
La
situation : Une femme enceinte (assez proche du terme, celle-là) arrive de
ville en catastrophe au bloc. Souffrance fœtale, césarienne indispensable en
urgence, pas question de transporter au CHU (à bien plus de 20 minutes…) Bref, faut y aller…
Plus
habituée à endormir des vieilles pour col du fémur entre deux réanimations
d’automobilistes désarticulés en bordure d’autoroute, Mme Plouc révise
mentalement ses pompes sur le cas particulier des césariennes…
Les
médecins ne m’en voudront pas de schématiser, je n’y connais rien. Disons
simplement que l’agent anesthésiant ne doit pas franchir la barrière
placentaire. Et que pour ce faire, il y a (ou avait à l’époque) deux méthodes ;
appelons-les A et B. A était sans doute la plus courante et Mme Plouc avait
sûrement déjà dû l’appliquer ou la voir appliquer… Alors que B devait relever
pour elle de la formation théorique initiale jamais mise en pratique…
Bref,
entrée au bloc avec le cirque habituel de l’habillage. A côté d’elle, devant le
lavabo à pédale, un jeune gandin fait de même : le chirurgien ?
Forcément, qui d’autre ?
Le
type : C’est vous l’anesthésiste ?
Mme
Plouc : Oui.
Le
type : Vous utiliserez la méthode B.
Mme
Plouc : Euh… J’aurais pensé que la méthode A…
Le
type : Ecoutez ! Vous n’êtes pas médecin, n’est-ce pas ? Donc
vous agissez sous ma responsabilité. Vous utiliserez donc la méthode B.
Mme
Plouc : ??
Le
type : La méthode B - on m’a appris ça à l’internat - donne une anesthésie
plus profonde et plus longue. C’est mon premier remplacement en solo. Et comme
je n’ai encore jamais fait de césarienne, je préfère. Vous utiliserez la
méthode B, point barre…
Mme
Plouc : Bon, on y va…
La mère et l’enfant se
portent bien…
je me souviens d'un patron qui préconisait l'abstention dans de nombreuses situations dépassées
RépondreSupprimeril disait souvent "de mon temps, on faisait comme ça.....et on n'en mourrait pas plus !"
gag , évidemment