Ce
sang, ces tripes ouvertes, ces corps lynchés, torturés à mort et gisant désarticulés
qui étaient ceux de personnes. De ci-devant vivants qui devraient
l’être encore, sous le manteau protecteur grand ouvert de droidlhom™ qu’ils
n’ont pas eu la chance de connaître et que le monde nous envie…
Tout
organisme vaguement administratif exerçant plus ou moins un rôle de
magistrature cherche à étendre ses prérogatives. C’est la loi du genre. Et ça
vaut bien entendu pour le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel. S’arroger
peu ou prou le rôle inexistant (et
c’est heureux) d’un hypothétique Conseil de l’Ordre des Journalistes est une chose
qui le chatouille. Etendre ses prérogatives en matière de censure est
aussi une tentation naturelle. Et d’autant plus tentante qu’une censure orientée
conforme aux penchants de l’exécutif actuel n’est plus une censure (vilain mot) mais le seul souci légitime de protéger l’acuraba
du doute, chose néfaste pour la religion d’Etat que nul n’oserait contester (droidlhom™, vivrensemble™, toussa…)
Prenant
le prétexte d’avoir été choqué en février dernier par quelques images "peu
soutenables" diffusées par France 2 (intervention française au
Mali) le CSA vient d’adopter une nouvelle recommandation
sur le traitement des conflits.
Cette recommandation adressée
à toutes les chaînes concerne le "traitement des conflits
internationaux, des guerres civiles et des actes terroristes". Elle
invite les médias au "respect de la dignité de la personne humaine en s’abstenant
de présenter de manière manifestement complaisante la violence ou la souffrance
humaine lorsque sont diffusées des images de personnes tuées ou blessées et des
réactions de leurs proches".
En
dentelle, ah que la guerre est jolie…
Il recommande
également de respecter "l’ordre public et l’honnêteté de
l’information" tout en traitant "avec la pondération et
la rigueur indispensables les conflits internationaux susceptibles
d’alimenter des tensions et des antagonismes au sein de la population".
Si le souhait d’éviter aux regards puérils et innocents des
traumatismes inutiles et des prises de conscience prématurées est légitime, cette recommandation
me semble tomber, comme par hasard, à point nommé. Dans cet ukase dédié au
respect de la dignité des victimes, de la souffrance des proches, etc. vous m’expliquerez
ce que vient faire "l’ordre public" et le traitement des infos
afin de ne pas "alimenter des tensions et des antagonismes au sein de
la population". Même si on a compris, vous et moi…
Bref, il ne faudrait pas que l’acuraba moyen au ventre plein qui n’a
jamais connu la guerre chez lui, bordé bien au chaud entre dame Sécu et
le principe de précaution, puisse être perturbé par le réel. Des fois qu’il
s’imagine avec des ennemis ! (hormis les
gngnphobes, évidemment…)
Ça
me refait penser, moi qui radote, à un passage de ce que j’écrivais en 2010 après une
conversation avec mon Martien :
"S’agissant de la guerre psychologique, pour
ne pas inquiéter les siens l’Empire du Bien évite de diffuser les violentes
harangues quotidiennes et bestiales d’appel au meurtre éructées par les leaders
les plus violents de l’ennemi. En revanche, il offre avec gourmandise une
tribune aux porte-parole de l’ennemi dès lors qu’ils paraissent présentables et
rassurants. Parallèlement, l’Empire du Bien s’emploie activement à poursuivre
et condamner ceux des siens qui critiquent ouvertement l’ennemi…"
A partir du moment où on nous prêche les bienfaits de certaines guerres, il ne faut évidemment pas que le public puisse visualiser le résultat certain de toute guerre : des morts.
RépondreSupprimerje ne crois pas que ce soit la vue des morts qui les choque. En France une grosse paire de nichons et un braquemart d'âne sont plus censurés qu'une scène de torture ou d'assassinat. Ce qui les choque c'est qu'on puisse en tirer des conclusions sur "qui tue qui".
RépondreSupprimerCe que résume notre Plouc en "il ne faudrait pas que l’acuraba moyen [...] puisse être perturbé par le réel."