Mai, mois des
ponts.
Sur
les billets en Euros, on a scrupuleusement veillé à exclure de la vue (de la vie?) toutes
références à un pays précis, à un
monument précis, à une personne ;
même Charlemagne ou les pères fondateurs du machin
étant trop réducteurs… Outre l’omniprésence d’une carte géographique sans
frontière et des douze étoiles dont le sens originel s’est perdu, la déco retenue se limite à deux symboles : au recto des portes ou
fenêtres ouvertes et, au verso, des ponts ; symboles respectivement, de l’accueil et, à condition de faire l’effort de tourner la page, symbole de la libre circulation et de l’échange entre les peuples…
Toutefois,
les nécessités du réel ont conduit à consentir de faire apparaître une
progression dans la chronologie des styles architecturaux et moyens techniques
illustrés. Et on ne pouvait faire débuter la série au Traité de Rome, ni même
aux Lumières. C’est contrariant, je sais, d’autant que les graphistes ont dû se
tordre les méninges pour que certaines des portes les plus anciennes ne fassent
pas penser à des portes d’églises. Mais bon.
Au
demeurant, les ponts symbolisaient encore bien, à l’orée du XXI° siècle, cette
joyeuse possibilité d’aller et venir des hommes, des marchandises, des
richesses… et des prestations sociales, ne les oublions pas. Mais c’était déjà
avant-hier soir.
De
nos jours, ces ponts-là, couchés sur le
papier, symbolisent il est vrai toujours la même chose. J’en veux pour
preuve que la construction d’un pont entre Lampedusa et la côte libyenne serait
un investissement créateur d’emplois et d’économies en secours maritimes. Même les
plus farouches écologistes défenseurs des écosystèmes n’y verraient rien à
redire en dépit du drame que ce serait dans la chaîne alimentaire pour la
murène et le cœlacanthe de Méditerranée.
Il
n’en est pas de même pour les ponts du mois de mai. Ceux-là sont à l’évidence des
obstacles à la croissance du Produit Intérieur Brut ! Par quelque effet
comme l’alignement des planètes, il est des années où ils se retrouvent tous
les quatre dans ce qui fut et reste encore pour certains le mois de Marie. Et
ça craint…
Dans
la prolongation du film-culte 1792-Commune-Congrès de Tours sous-titré "Du
passé faisons table rase", le consortium Macron-MEDEF-Fran mac’ et ses
idiots utiles attirent l’attention sur le coût insupportable de ces ponts pour la croissance, l’emploi, toussa… Evidemment, ils se gardent bien de
calculer que, lorsque ces quatre ponts
se conjuguent dans la pire des hypothèses de calendrier, ils n’ont sur le temps
annuel travaillé qu’un impact trente fois moindre que les 35 heures, non
compris les effets induits de celles-ci sur les RTT et la désorganisation du
travail dans certains secteurs… Mais c’est ainsi et ce souci vient judicieusement relayer l’extension de la lutte pour le travail du dimanche…
Au
demeurant, ces ponts sont des
symboles bien moins virtuels que les ponts de papier de la BCE. Ils sont tous
les quatre liés à notre histoire et tous contribuent à notre identité commune. Commémorer la Victoire contre le nazisme, le 8 mai n’est pas plus négociable
que le 1° mai célébrant la fête du Travail. La tentative absconse qu’avait
faite Giscard de supprimer le 8 mai et d’en noyer le souvenir dans une
célébration commune le 11 novembre suffit d’ailleurs, après coup, à montrer que
son septennat marquait bien le début de la décadence et de l’inculture
historique de modernœud : S’il y
avait un jour chômé à supprimer ou à transformer en jour de deuil, c’était le 11
novembre qui concluait le suicide de la civilisation européenne…
Quant
au lundi de Pâques et au jeudi de l’Ascension, si leur raison d’être originelle
est désormais ignorée par l’écrasante majorité et, aux dires de nozélites déculturées, un résidu suranné
de croyances des temps obscures en des
racines chrétiennes fantasmées, ils sont profondément ancrés dans les
cerveaux reptiliens de tous. Et il n’est pas une association sportive ou
corporatiste ne croyant ni à Dieu ni à diable qui manquera à l’appel pour les
défendre comme le lundi de Pentecôte ! Ils ne savent pas pourquoi mais c’est
comme ça. Et c’est souvent parce qu’on ne sait pas dire pourquoi qu’un symbole d’identité
est le plus solide…
* Photo de tête : Ce matin à 8h au dessus de chez moi là-haut. en ce jour de l'Ascencion.
(ascencion que mes coronaires ont évidemment déléguée à ma descendance...)
"Et c’est souvent parce qu’on ne sait pas dire pourquoi qu’un symbole d’identité est le plus solide…"
RépondreSupprimerJ'aime beaucoup cette phrase. J'aimerais la voir comme sujet au bac philo. Faites-vous les dents, les agneaux!
Et me voilà choper un billet de dix et un billet de vingt et de constater ce à quoi je n avais jamais fait attention !
RépondreSupprimerSuperbe photo de tête !
et date du prochain déjeuner envoyée par email ce soir :)