Panique à bord quand le Hollandais volant,
c’est-à-dire le navire fantasmé dont on sait trop bien d’où il vient mais qui
ne sait où il va, navire "hors-sol", en vient à tutoyer les flots du
réel…
Et la panique est telle qu’elle
atteint jusqu’aux larbins les plus dévoués au capitaine.
J’évite en général de retranscrire
in-extenso ici la prose de tiers. On alors seulement des extraits significatifs
pour donner envie de l’aller lire en donnant le lien, surtout lorsque cela peut
faire la promo d’un blogueur "ami". Là, il s’agit d’un billet publié
mardi dernier dans Challenges sous la
plume de… Bruno Roger-Petit ! Autant dire que je n’ai aucun
scrupule :
« Julien Dray est devenu la Cassandre de François Hollande. Qui dit
tout haut au président, le soir, ce que personne n’ose plus lui dire le jour.
Et souvent, Julien Dray a raison. Parce qu’il est de ces derniers rares
socialistes, loin de la bourgeoisie de l’Etat-PS, à sentir les mouvements de
l’opinion.
Si l’on en croit l’écho rapporté cette semaine par Nicolas Domenach dans Challenges, Julien Dray a mis en garde François
Hollande. Le dossier de la réforme du collège, mal initié par Najat
Vallaud-Belkacem, soutenu corps et âme par le Premier ministre, est en passe de
se transformer en remake du Mariage pour tous. "Si tu ne recules pas sur
la réforme des collèges" a dit Julien Dray au président, "il y aura,
à la rentrée prochaine, un million de personnes dans la rue mobilisées par la
droite qui n'attend que cette occasion".
Trop de dogmatisme
Lucide, Julien Dray constate que pour le moment, il n’a pas convaincu. En
dépit de sa démonstration sur le "risque insensé" qui est pris à
"soutenir aveuglement" Najat Vallaud-Belkacem, le vice-président de
l’Ile-de-France parle à un sourd élyséen. "Trop de dogmatisme"
regrette-t-il avant d’avouer : "Je n’ai guère été entendu". Julien
Dray a pourtant saisi l’essentiel. La réforme du collège est morte parce que le
combat engagé par Najat Vallaud-Belkacem et Manuel Valls est perdu d’avance.
Sur un terrain culturel où la droite est dominante depuis des années pour cause
de zemmourisation audiovisuelle administrée à haute dose depuis dix ans, la
gauche pédagogiste est d’ores et déjà vaincue.
Cristallisé sur la question de la mise à mort progressive programmée du
latin et du grec, l’enseignement de l’apport historique des Lumières et de la
civilisation médiévale, ravalé au rang d’options selon le bon plaisir des
élèves, le rejet de la réforme parait désormais majoritaire.
On avait écrit ici, la semaine passée, que sur un champ de bataille
relevant du politique et du culturel, en l’état, la gauche de gouvernement
avait tout à perdre, surtout face à un Nicolas Sarkozy qui s’apprêtait en
rejouer une mobilisation de type Mariage pour tous, avec Bruno Le Maire en
instrument consensuel de combat : nous y sommes.
Les deux erreurs de Manuel et Najat
Najat Vallaud-Belkacem et Manuel Valls se trompent deux fois.
La première en tentant de ramener le débat à un duel traditionnel droite
contre gauche. Progrès contre réaction. Mouvement contre immobilisme. Egalité
contre élitisme. Quand toute la gauche intellectuelle, dans toutes ses
diversités, de Pierre Nora à Michel Onfray, en passant par Régis Debray ou
Jacques Julliard, rejoint le plus consensuel des écrivains français de droite,
Jean d’Ormesson, la guerre scolaire est perdue d’avance. En France, depuis
trois siècles, quand les intellectuels refusent de marcher, c’est que l’idée de
progrès n’est pas au rendez-vous. A leurs yeux, c’est le cas avec la réforme du
collège signée Vallaud-Belkacem.
La tentative de Libération, dans son numéro de ce mardi, de tenter de
mobiliser quelques intellectuels pour défendre la réforme des collèges a fait
long feu. Quand Nicolas Offenstadt, intellectuel de Ligue 2 aux yeux de
l’opinion, vient expliquer que Pierre Nora, modérément hostile à la réforme
Vallaud-Belkacem, est porteur d’une vision identitaire et réactionnaire de
l’histoire à l’école, on mesure ce qu’est le drame du dernier carré de la
gauche attachée à cette réforme, et sa déconnexion des réalités de l’opinion
française. Zemmouriser Pierre Nora dans Libé, il fallait oser…
Des pans entiers de l’opinion de gauche se reconnaissent en Onfray, Debray,
Nora ou Julliard. Et même d’Ormesson. En cas de mobilisation massive des
contestations contre la réforme du collège, ces pans-là ne soutiendront pas la
gauche de gouvernement, comme ils le firent lors de la bataille du Mariage pour
tous.
En 2013, dans le sillage de Frigide Barjot, les manifestations massives
reflétaient les peurs identitaires d’une France de droite devenue
sociologiquement minoritaire. Si pareil mouvement devait se lever contre le
projet de réforme des collèges, il serait non seulement massif, comme le
pressent Julien Dray, mais également majoritaire, rassemblant des Français de
tous horizons. De gauche. De Droite. Du centre. Tous mobilisés parce qu’ayant
le sentiment, on dit bien le sentiment, que cette réforme porte atteinte à l’un
des derniers bastions républicains encore fédérateurs et porteurs d’espérance :
l’école.
On touche là à la seconde erreur de Najat Vallaud-Belkacem et Manuel Valls.
Ils se refusent à voir que les Français aiment l’excellence à l’école et
refusent que l’on détruise le symbole de la méritocratie républicaine qu'elle
porte ontologiquement.
Une anxiété identitaire
Les arguments chiffrés de Manuel Valls se retournent contre lui, donnant
raison aux détracteurs de la réforme. "Ils ne sont que quelques milliers à
bénéficier de l’enseignement du latin et du grec ou des classes bilangues"
avance le Premier ministre pour justifier l’éradication de ces matières et
filières. Mais alors, pourquoi abattre, au nom de l’égalité, des matières et
des filières qui consacraient des élèves méritants ne dérangeant personne ?
C’est en cela que la réforme est génératrice d’anxiété identitaire, donc de
rejet, parce qu’elle donne le sentiment de voler aux excellents pour en faire
des mauvais sans donner aux mauvais le moyen de devenir bon.
Répétons-le : les classes moyennes et populaires aiment une école qui
promeut l’excellence à travers le latin, le grec, les classes bilangues ou
l’histoire des Lumières, parce que même si leurs enfants n’en bénéficieront
pas, elles ont le sentiment que cette école est haut de gamme. C’est pour
cette raison qu’elles sont sensibles à la campagne déployée autour de
l’expression "nivellement par le bas".
Ces classes moyennes et populaires ne voient dans la réforme du collège ni
mouvement, ni progrès, mais une égalité de régression par le partage de
l’ignorance. Ce n’est pas la question des moyens qui est au cœur des débats
autour de la réforme du collège, mais sa philosophie même, qui a contribué à
engendrer le sentiment désormais majoritaire que le gouvernement s’attaquait à
l’excellence au nom d’une lutte contre de prétendus privilèges.
En vérité, compte tenu de l’état de l’opinion, dont une majorité relative
est plus sensible aujourd’hui au discours touchant à l’identité nationale qu’à
la République, sur un fond culturel marqué par la zemmourisation des esprits,
face à une droite sur-mobilisée et une gauche multi-fracturée sur le sujet, la
gauche de gouvernement déclenche une guerre scolaire qu’elle n’a aucun moyen de
gagner.
Si le gouvernement persiste à vouloir imposer ce projet, la prophétie de Julien
Dray pèsera. Pour le moment, même si à certains égards, c'est peut-être
injuste, Najat Vallaud-Belkacem et Manuel Valls passent aux yeux des Français
pour les auteurs auto-satisfaits de L’Ecole pour les nuls. Une école dont ils
ne veulent pas. »
Merci pour cette analyse qui rassure. : mobilisons nous !
RépondreSupprimerC'est forcément une grande et bonne réforme puisque Peillon la soutient avec les pédagogues et les sociologues. Ainsi que la FCPE (encore une subvention de 150 K€ fin 2015 ?).
RépondreSupprimerOn pourrait peut-être écouter les soutiers qui sont au charbon :
http://www.lepoint.fr/societe/classes-europeennes-qu-on-arrete-de-dire-que-ce-sont-des-classes-de-privilegies-18-05-2015-1929164_23.php
Droopyx
et bien, espérons là cette maga manif, elle va réveiller les Français qui sont bien passifs !
RépondreSupprimer"Sur un terrain culturel où la droite est dominante depuis des années pour cause de zemmourisation audiovisuelle administrée à haute dose depuis dix ans".... pincez-moi, je rêve... !!!
RépondreSupprimerQuant à voir BRP parler de manifestations "massives" et d' "un million de personnes dans les rues" en faisant explicitement référence à la Manif pour Tous, ça ne manque pas de sel...
J'y avais pensé et nous ne sommes pas les seuls : D'autres dont Libé et des élus socialistes se sont inquiétés de ce "million" en évoquant MPT dont ils se faisaient des gorges chaudes en parlant de 300.000 à l'époque... Mais personne ne se souvient...
Supprimeroui éric zemmour et la pensée réactionnaires sont partout mais on ne les voit nulle part (en tout cas pas sur les principaux canaux d'info comme les chaines de TV principales ou meme de la TNT, ou encore sur les sites internet "de référence" non frappés du sceau infamant de l'extrème droite) un peu comme le complot juif ou encore celui du gouvernement américain qui cacherait "bien des choses" aux honnetes citoyens américains (simple paranoia collective issue de plusieurs décennies de guerre froide avec le bloc communiste, de menace de guerre atomique terminale et de guerres au vietnam en afghanistan en amérique du sud et centrale et en irak, bien réelles celle la)
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