Dans l’Énéide, Virgile faisait
parler ainsi Laocoon qui refusait l’entrée du cheval à Troie. Trop tard, bande
de cons ! Le canasson est déjà dedans ! Et vous n’avez plus rien d’autre
à faire que de tenter de repousser le plus possible le moment où il ouvrira sa
panse et déversera son contenu de pillards europhages qui vous submergeront. Et
ce moment viendra de toute façon…
En ce dimanche où ça pédale dans la
semoule du côté de Bruxelles, en attendant la suite demain, je soumets à votre
méditation ce papier un peu long pondu ce
matin par Charles Gave chez Atlantico.fr :
« La tragédie Grecque continue à faire la première page des journaux un peu partout, les journalistes nous expliquant que le gouvernement Grec est d’une incompétence inimaginable et que le pire est à venir pour la population. Plus le temps passe, moins j’en suis sûr. Réfléchissons deux minutes.
Imaginons par exemple que le gouvernement grec ait parfaitement compris
qu’il n’avait aucune chance de s’en sortir et que la seule solution était pour
la Grèce de faire faillite.
Dans la première crise Grecque en 2011, la dette était détenue en
quasi-totalité par des banques étrangères (Françaises, Italiennes…) installées
en Grèce et qui avaient fait preuve de beaucoup de légèreté dans les crédits
qu’elles avaient octroyées à des emprunteurs Grecs. C’est un principe du droit
commercial qu’accorder des crédits à des gens qui ne pourront jamais les
rembourser est une faute lourde. De ce fait, ne pas rembourser des banques étrangères
est historiquement une pratique assez courante. Logiquement donc,
les banques étrangères auraient dû s’assoir avec leurs débiteurs Grecs et
négocier avec eux les pertes qu’elles allaient devoir prendre.
Hélas, nous sommes dans un monde gouverné par des banquiers, au profit des
banquiers. Le but essentiel de la première négociation fut donc non pas de
permettre à la Grèce d’assainir une fois pour toutes ses finances, mais de
protéger les intérêts des banquiers qui avaient commis une énorme boulette et
monsieur Sarkozy se distingua particulièrement dans cette tâche.
Papandreou, le premier ministre de l’époque, qui voulait organiser un
referendum sur le sujet fut remplacé assez rapidement par le Quisling de
service, Lucas Papademos, ancien de la BCE (!) qui négocia un remarquable
accord, extrêmement favorable aux banques étrangères et désastreux pour la
Grèce, en substituant des organisations internationales aux banques étrangères.
Les banques étrangères furent donc sorties sans trop de dégâts du trou
dans lequel elles s’étaient mises et remplacées par la BCE, le FMI etc.…
L’ennui est que la dette Grecque est maintenant due à des
organisations internationales et qu’il est impossible juridiquement
de renégocier avec ces organisations des remises de dettes, sauf à perdre pour
un grand moment tout crédit auprès d’elles. Voilà qui parait être une situation
sans issue. La Grèce et son gouvernement sont coincés et bien coincés, du moins
en apparence.
Les lignes qui vont suivre ne sont bien sûr qu’une tentative pour expliquer
que tant que la Grèce reste dans le cadre légal que lui impose l’Euro, elle n’a
aucune chance de s’en sortir. Par contre, si elle prend le risque de sortir,
alors, elle a beaucoup plus de cartes en main qu’on veut nous le faire croire.
Inutile de dire que je n’ai aucune information spéciale, n’étant pas dans le
secret des Dieux.
Pour comprendre ce qu’est peut-être la stratégie du gouvernement Grec, il
faut se rappeler une boutade célèbre : Si vous devez 100.000 euro à votre
banquier, vous avez un problème. Si vous lui devez 300 milliards, il a un
problème Donc soyons clairs, ce sont la BCE, le FMI etc. qui ont un
problème, pas la Grèce.
Or le gouvernement Grec sait très bien que dès qu’il aura fait
faillite, ce qui est inévitable, il n’aura plus accès à aucun financement
et ce pendant un grand moment. Il lui faut donc se constituer un trésor
de guerre, que les autorités internationales ne pourront pas saisir.
Logiquement, il aurait dû installer comme à Chypre, des contrôles des changes,
des contrôles des capitaux et que sais-je encore, pour garder le peu de devises
qu’il avait. Or qu’est que je constate? Les déposants Grecs peuvent librement
transférer de l’argent de leur compte en Grèce à n’importe quel compte
étranger (à leurs cousins en Australie, en Allemagne ou aux USA…), ou, s’ils
n’ont pas de cousins, ils peuvent transformer leurs dépôts en billets de banque
et les mettre dans un coffre chez eux.
La masse monétaire Grecque s’effondre donc, puisqu’elle est en train de se
déverser aux USA, en Allemagne ou en Australie. Dans une situation
« normale », le taux de change de la monnaie Grecque devrait
s’effondrer, mais il n’en est rien puisque ces transferts sont financés par …la
BCE.
Explication :
La banque commerciale Grecque de base a en réserve d’importantes quantités
de bons du Trésor Grecs, émis pour financer le déficit budgétaire Grec par le
passé. Notre banque commerciale présente donc ces bons à la banque centrale
Grecque, pour réescompte. Laquelle les présente à la BCE, pour avoir du
cash. Et les transmet à la banque commerciale Grecque qui peut financer les
retraits. Et ce cash se retrouve dans les poches …des citoyens Grecs.
Le trésor de guerre est donc dans les mains des citoyens Grecs et ces
sommes resurgiront des que la Drachme sera recréée. On parle déjà de plus de
100 milliards d’Euro avancés par la BCE à la banque centrale de Grèce. .
Ce petit jeu durera aussi longtemps que la BCE escomptera et donc le
gouvernement Grec a tout intérêt à faire ses échéances aussi longtemps qu’il le
peut puisque tant qu’il paye 500 millions, les citoyens Grecs peuvent tirer 5
milliards.
Le but du gouvernement Grec est à l’évidence de faire trainer les
choses le plus longtemps possibles en espérant que la BCE ne va pas siffler la
fin de la partie, ce qui la forcerait à prendre ses pertes immédiatement.
La BCE est donc dans une situation où si elle arrête les
financements, elle perd puisque cela forcerait la Grèce à sortir et si elle ne
les arrête pas, elle perd aussi. Et le gouvernement grec le sait fort
bien.
C’est là où le cheval de Troie revient en mémoire, et peut être la BCE
aurait dû se poser des questions sur ces paiements mais nos banquiers
centraux sont non seulement incompétents mais incultes.
Quand la musique s’arrêtera, l’Etat Grec fera défaut sur 340 milliards,
au moins 100 de ces 340 milliards étant dans les comptes de citoyens
Grecs en dehors de Grèce, ou en billets de banque en Euro dans les matelas
en Grèce, et ces billets ou dépôts étrangers resteront parfaitement
valables si la Drachme revient. Si et quand la Grèce sortira de l’Euro,
les citoyens Grecs auront donc une forte hausse de la valeur de leur épargne,
ce qui leur permettra de consommer à nouveau. Quand la Drachme sera réintroduite,
elle baissera de 50 % ou plus, ce qui permettra à l’économie Grecque de
repartir comme une fusée. Je viens de passer quatre jours à Rhodes, où 80 % de
l’activité provient du tourisme. Question : Qui ira en Espagne, en Italie
ou en France pour payer deux fois plus cher qu’en Grèce? Réponse,
personne.
En Grèce, les transactions domestiques habituelles pour acheter la feta,
les olives, ou pour payer les salariés de l’hôtel se passeront évidemment
en monnaie locale, mais si vous voulez vous acheter une maison à Patmos, il
faudra le faire en dollar ou en Euro.
Parallèlement, le gouvernement Grec, qui sera toujours dans l’Union
Européenne, commencera à ouvrir des négociations avec la Russie par exemple,
pour louer à cet autre paria une grande base maritime proche de la Turquie, et
ce ne sont pas les ports qui manquent en Grèce. Et la Russie se retrouverait
avec un port de plus en Méditerranée face à la Turquie , ce qui
serait bien pratique pour contrôler la première armée Sunnite du monde, l’armée
Turque, et pour surveiller les flottes Américaines ou Turques.
Monsieur Redorant risque de tousser un peu, mais ce grand démocrate
demandera aux USA que faire et j’attends avec impatience la réponse de ce génie
de la politique étrangère qu’est monsieur Obama…
Voilà qui pose la question à terme du maintien de la Grèce dans l’Otan,
mais en virer la Grèce ne sera pas facile. Autrefois, les USA auraient
demandé à l’armée Grecque de faire un coup d’Etat, mais il parait que cela
n’est plus de mode, sauf en Ukraine bien sûr. Avec le brillant résultat que
tout un chacun peut constater.
Peut-être le gouvernement Grec, s’il a le sens de l’humour, ira-t-il
alors jusqu’à solliciter des crédits aux nouvelles institutions
financières qui viennent de voir le jour en Chine, pour financer un gazoduc qui
irait de la Russie à l’Autriche, en passant par le Grèce. Ou bien
demanderont ils de l’argent pour financer le développement du port d’Athènes,
qui après tout, appartient aujourd’hui aux Chinois. Peut- être les
propriétaires Chinois demanderont ils un crédit au gouvernement Chinois, ce qui
serait plaisant.
Et donc, contrairement à ce que vous lisez dans tous vos
journaux, la Grèce a beaucoup de cartes en main et l’Europe beaucoup
moins que l’on essaie de nous en convaincre.
La seule solution pour les puissants esprits qui ont créé l’Euro serait
d’annuler totalement la dette grecque, mais l’Italie, l’Espagne et le Portugal
demanderaient immédiatement la même chose, ce qui mettrait le système
financier Allemand en faillite puisque les balances « Target » qui ne
sont que la somme des excédents des comptes courants allemands contre le reste
de l’Europe depuis les débuts de l’Euro sont aux alentours de 1000 milliards
d’euro. Et ces mille milliards qui n’en vaudront que 500 à tout casser dans le
cas de remises des dettes généralisées sont dans l’actif des institutions
financières Allemandes tandis que les fonds propres de ce système
financier Allemand sont de 350 milliards. Prendre une perte de 500 milliards
avec des fonds propres de 350 milliards n’est pas chose facile .Et l’électeur
de Madame Merkel n’apprécierait sans doute pas.
Bref, l’Euro n’était pas une bonne idée, y faire rentrer la Grèce et
l’Italie une imbécillité. Merci Goldman Sachs qui n’a jamais été poursuivi pour
avoir tripatouillé les comptes de ces deux pays, ce qui est bien normal
puisque celui qui a négocié avec Goldman pour maquiller les comptes de l’Italie
n’était autre que monsieur Draghi.
Conclusion:
Est-ce que la Tragi-comédie qui vient de se passer entre le referendum, la
démission du flamboyant ministre des Finances Grecs et la capitulation
apparente en rase campagne de Tsipras change quoi que ce soit à cette analyse
quelque peu cynique ?
Je ne le crois pas une seconde.
Il reste encore beaucoup de dépôts bancaires à changer en billets en Euro
en Grèce, tous les grecs n’ayant pas vraiment compris. La fermeture des banques
Grecques pendant une semaine a dû convaincre même les plus obtus.
Si un accord a lieu ce weekend, la BCE sera en effet obligée d’ouvrir des
lignes de crédit quasiment illimitées à la banque centrale Grecque, ce qui
permettra de mettre de côté quelques dizaines de milliards d’Euro de plus dans
les bas de laine Grecs et de faire croitre d’autant la perte à terme de
la BCE et donc des Européens, tout en préparant en grand secret, avec
les Russes, l’impression de Drachmes qui seront fort utiles le jour venu.
Tout le monde sait (voir les
analyses du FMI sur ce sujet) que la
dette Grecque est insoutenable à terme.
Dans trois mois, dans 6 mois au plus, nous aurons une nouvelle crise
Grecque qui cette fois sera la bonne.
Apres tout, les Grecs ne font que suivre le vieux proverbe Allemand :
” Il vaut mieux la fin de l’horreur qui horreur sans fin”.
Simplement, ils ont décidé que ce sont eux et
eux seuls qui détermineront le moment où ils vont passer de
l’horreur à la
fin de l’horreur. »
Charles Gave
Magnifique démonstration ! Et bonus spécial pour le magouillage Draghi & co !!!
RépondreSupprimerAnnette Lanonymette
Je le sais bien, moi-même, en mon âme et en mon
RépondreSupprimercoeur : un jour viendra où périront Ilion la sainte, et Priam,
et le peuple de Priam à la forte lance. Homère, Iliade Chant VI.
Article eclairant merci Plouc'em au plaisir.
RépondreSupprimerDominique.
tiens , ce matin , sur vronze cul , pascal canfin, ex sous sous sous minis' de quèque chose , a reconnu que ça ne réglait rien puisque dans "deux mois ou trois ou six , il faudra un nouveau sommet pour les mêmes raisons "
RépondreSupprimermouarf !