Il y a des commémorations qu’on ne peut pas laisser passer sans rien dire. Avant-hier par exemple…
Que puis-je faire ? Guère plus que relayer ici et commenter un peu le billet publié hier sur son blog par Bernard Lugan :
Cinquante ans après la fin de la guerre d’Algérie, par le biais d’une machination particulièrement bien orchestrée, policiers, gendarmes mobiles, CRS et Harkis engagés le 17 octobre 1961 à Paris dans une opération de maintien de l’ordre, sont devenus des agresseurs accusés d’avoir massacré 300 manifestants algériens, d’en avoir jeté des dizaines à la Seine et d’en avoir blessé 2300.
Tous les ans depuis 1991, ceux que le FLN désigne sous le nom de « Frères des Frères », organisent à grand renfort médiatique une cérémonie à la mémoire des « Martyrs Algériens » du 17 octobre 1961. Au mois d’octobre 2000, les « Frères des Frères » ont créé l’ « Association 1961 contre l’oubli ».
Cette année, la commémoration a pris un éclat particulier avec la présence du candidat socialiste aux futures élections présidentielles lequel a lancé une rose rouge à la Seine en mémoire des manifestants qui y auraient été noyés…
Or, contrairement à ce qui est affirmé par des médias dont l’inculture est à l’égal de l’esprit partisan, le 17 octobre 1961, il n’y eut pas de massacre d’Algériens à Paris.
Revenons aux faits. Nous sommes en pleine guerre d’Algérie et le FLN qui cherche à prendre le contrôle de la communauté algérienne vivant en France organise une manifestation surprise et clandestine devant converger vers la Place de la Concorde et l’Elysée afin de montrer sa force et pour peser sur les pourparlers de paix qui ont lieu à Evian.
Assaillis de toutes parts, les 1300 hommes des forces de l’ordre rassemblés en urgence, et non 7000 comme cela est toujours dit, firent preuve d’un grand sang-froid et d’un immense professionnalisme se traduisant par un bilan des pertes « modéré » dans de telles circonstances.
Contre les affirmations des complices du FLN et des auteurs militants, les archives de l’Institut Médico Légal de Paris, (la Morgue), sont pleines d’enseignements. Le Graphique des entrées de corps « N.A » (Nord-africains) par jour. Octobre 1961, nous apprend ainsi que du 1° au 30 octobre 1961, 90 corps de « NA » , Nord-africains selon la terminologie officielle de l’époque, sont entrés à l’Institut médico légal, la plupart étant d’ailleurs des victimes du FLN…
Le 17 octobre, alors que se déroulait dans Paris un soi-disant massacre, l’Institut Médico Légal n’a enregistré aucune entrée de corps de « NA ». Et pour cause, le 17 octobre 1961, de 19h30 à 23 heures, une seule victime fut à déplorer dans le périmètre de la manifestation, et ce ne fut pas un Algérien, mais un Français nommé Guy Chevallier, tué vers 21h devant le cinéma REX, crâne fracassé et dont rien ne permet de dire que ce fut par la police. En dehors du périmètre de la manifestation « seuls » 2 morts furent à déplorer, Abdelkader Déroues tué par balle et retrouvé à Puteaux et Lamara Achenoune étranglé gisant dans une camionnette, également à Puteaux.
Certes, nous dit-on, mais les morts ont été déposés à la morgue les jours suivants. Or, et une fois encore, ce n’est pas ce qu’indiquent les archives de l’IML car, entre le 18 et le 21 octobre, seuls 4 cadavres de « NA » (Nord-africains) furent admis à la Morgue :
- le 18 octobre, Achour Belkacem tué par un policier invoquant la légitime défense et Abdelkader Benhamar mort dans un accident de la circulation à Colombes.
- le 20 octobre, Amar Malek tué par balles par un gendarme.
- le 21 octobre Ramdane Mehani, mort dans des circonstances inconnues.
Soit du 17 au 21 octobre, 7 morts, dont deux seulement peuvent être imputés aux forces de police. Nous voilà bien loin des 300 morts avancés par certains… Ces chiffres prennent toute leur signification si nous nous reportons au début du mois d’octobre. Ainsi, entre le 1er et le 3 octobre, 24 corps de « N.A » entrèrent à l’IML, victimes de la guerre inexpiable que le FLN menait contre ses opposants partisans de l’Algérie française ou du MNA de Messali Hadj. Pour mémoire, de janvier 1955 au 1er juillet 1962, les tueurs du FLN assassinèrent en France métropolitaine 6000 Algériens et en blessèrent 9000.
Pour mémoire encore, le 26 mars 1962, devant la Grande Poste de la rue d’Isly à Alger, les forces de l’ordre ne firent pas preuve de la même retenue que le 17 octobre à Paris quand elles ouvrirent directement le feu sur une foule de civils français non armés, faisant entre 70 et 80 morts et 150 blessés. Sur ces victimes, réelles celles-là, la mémoire sélective a jeté le voile de l’oubli.
Bernard Lugan
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On me rétorquera que B.Lugan est un partisan au regard sélectif…
A son billet, j’ajouterai d’abord deux précisions pour contextualiser comme dirait Tarik Ramadan :
- On retient à l’envie que la manif ne visait qu’à protester contre le couvre-feu imposé exclusivement aux N.A. par le Préfet Maurice Papon (oui, celui-là, vous m’avez compris…) On oublie trop que cette mesure visait surtout à freiner les assassinats répétés par le FLN des Algériens refusant sa tutelle.
- On oublie aussi que la Police était alors victime d’attentats quasi permanents de la part du FLN (47 tués, 140 blessés
au total cumulé) Les flics parisiens ne faisaient plus la distinction entre citoyens Nord-Africains et agents du FLN. S’en indigner aujourd’hui n’est qu’un ridicule anachronisme…
Les "victimes innocentes" directes ou indirectes de la répression policière du 17 octobre 1961 ont très probablement été supérieures à zéro… Mais si on se réfère au travail d’historien sérieux de Jean-Paul Brunet, ancien directeur du département d’Histoire de Normal Sup’, on arrive péniblement à évoquer, post 17/10, une grosse trentaine de décès [kolossal crime contre l’humanité dans un contexte de guerre de fait] dont une large majorité serait le fait du FLN. Je cite Brunet : «anciens harkis, militants du MNA, anciens combattants de l’armée française, "traîtres" divers : maris de métropolitaines, Algériens refusant de payer l’impôt mensuel au Front, rétifs à la loi coranique, ou faisant simplement appel aux tribunaux français pour régler un litige…»
Maintenant que François Hollande est allé jeter une rose dans la Seine qui n’en a rien à foutre, il n’est pas douteux qu’il se voit déjà Président de la République allant main dans la main avec Delanoë et le président du CFCM inaugurer en grande pompe un monument mémoriel élevé aux frais du contribuable. Et il y a des honnêtes fonctionnaires jouissant aujourd’hui de leur retraite qui auront du souci à se faire vue l’imprescriptibilité de certains crimes…
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