La laïcité a ceci de délétère qu’elle interdit à nos médecins "traitants" d’aller en toute humilité mettre un cierge à Sainte Rita et s’en remettre à sa bienveillante intercession. Ils ont tort….
Sainte Rita de Cascia, épouse et mère, veuve et religieuse augustine, avocate des causes impossibles et sainte patronne des cas désespérés. J’en sais quelque chose ; je lui dois mon bac en son temps….
Hier encore, donc, nos Diafoirus ont confirmé à la famille l’état quasi stationnaire du (des) malades(s) qui bénéficie(ent) de toutes leurs attentions en soins intensifs. La 19° version définitive du Plan d’assistance respiratoire sera élaborée lors de la prochaine visite des chefs de service demain, ou plus tard… Il n’y a pas le feu au lac, tout est sous contrôle…
La porte battante s’est refermée sur les blouses blanches. Il n’y aura pas d’autre bulletin de santé aujourd’hui… Dans le couloir, les proches discutent en petits groupes à voix basses. Enfin, les proches… Les créanciers, les héritiers, les fournisseurs et les clients du malade, plutôt… Les autres ayant droits, on les voit par la fenêtre jouer dans la cour ; on ne leur a rien dit. C’est mieux comme ça…
Derrière la porte, la faculté souffle un peu. Une pause après toutes ces questions chiantes posées par la famille…
Mais bon, va falloir trouver autre chose. De ce murmure des conversations entre spécialistes, surnagent toujours par bribes les mêmes refrains : "la saignée !", "la diète", "alimentation par voie centrale", "il a quoi comme Sécu ?", "sa mutuelle paiera !", "c’est quoi sa mutuelle ?", "la saignée, je vous dis !"… "Bon, on leur dit quoi demain ?"
Bonne question… Pour les soins intensifs, on repassera. Il ne faut surtout pas leur dire, mais on ne prodigue plus depuis longtemps que des soins palliatifs, avec un souci, un seul souci : Pourvu que ça dure…
Il y a bien sûr ce cancer mou inopérable avec toutes ses métastases diffuses (impuissance fiscale, corruption et népotisme à tous les niveaux d’organes, etc.) qui nécessiterait des doses de rayon trop fortes pour être supportées.
Quant à l’euro, cette énorme tumeur qui va emporter le malade et qu’un coup de scalpel suffirait à enlever, il n’est évidemment pas question d’y toucher. C’est contraire à toutes les doctrines depuis Hippocrate !
D’ailleurs, la liposuccion de l’excès de dettes, cette mesure d’accompagnement indispensable qui pouvait éventuellement permettre au malade de supporter les suites d’une telle ablation, elle a déjà était amorcée dans le seul espoir de retarder les effets du cancer mou… Simple transfert graisseux donc vers des sujets aujourd’hui présumés encore sains. Mais c’est toujours ça de gagné…
Car pour nos Diafoirus, la seule chose qui compte, c’est de gagner du temps, chacun en fonction de son propre agenda, de sa propre réputation auprès de sa clientèle.
Prenez le nôtre, par exemple (et pour ses collègues, Angela et les autres, c’est pareil) : Je l’imagine agenouillé avec son cierge devant la statue de Sainte Rita (1) Ça peut surprendre mais c’est, me semble-t-il, à peu près la seule chose raisonnable qui lui reste à faire. Que pourrait-il lui demander, nom de Dieu ?
- Sûrement que la Grèce tienne le coup encore au moins jusqu’en juin 2012 avant que ça pète…
- Sûrement aussi que la Libye attende encore au moins huit mois avant de sombrer dans l’anarchie sanglante des guerres tribales et de remettre son pétrole et son Salut entre les mains exclusives d’Erdogan et du Qatar…
- Etc.
Sainte Rita a du boulot….
(1) Pour la statue, il a le choix. Il y en a suffisamment à Paris. Mais plutôt que celles-là ou celle de la chapelle de l’Annonciation du Vieux-Nice à qui je dois mon bac, ce serait peut-être pour lui plus approprié par les temps qui courent d’aller prier devant celle très kitch et Saint-Sulpice qui trône avec son nom calligraphié en arabe à droite en entrant dans la cathédrale melkite d’Alep (du moins si le "printemps syrien" ne l’a pas déjà réduite en graviers…)
Et quand le médecin lui-même commence à ne pas se sentir bien et pour les mêmes raisons que ses patients...je crains que même sainte Rita soit obligée de rendre les armes.
RépondreSupprimerJe crois que moi et ma petite mallette noire nous allons bientôt demander l'asile politique (et économique!) à la Suisse.