Attention à ne pas confondre ingérence et ingérence. Il ne s’agit pas ici
d’évoquer les ingérences illégitimes, oh combien condamnables, comme, par
exemple, l’ingérence dans la vie privée
de Taubira ou du Pédalonaute, dans les sources
de Médiapart ou les raisons du projet
de découpage en 14 régions… Non. Il s’agit bien du droit d’ingérence désormais acté parmi les dwoits imprescriptibles gna gna, etc.
Mais là encore, il ne faut pas confondre les torchons et les serviettes.
D’ailleurs, vous constaterez que les médias ne s’y trompent pas :
- Il y a le droit d’ingérence dont ils s’emploient avec ravissement à faire
la promotion à la moindre occasion. Celui-là, plutôt qu’un droit, c’est un devoir :
C’est le devoir d’ingérence humanitaire.
L’adjectif justificatif
"Humanitaire" peut s’y appliquer dans tous les cas. Même s’il
est souvent loin d’être évident, on vous expliquera ; en générale une
saoulerie de sensiblerie émotive télévisuelle suffira pour vous convaincre…
Mais un devoir pour qui ?
Pour les seconds couteaux, les débiteurs endettés, les clients au sens de la Rome antique, les satellites, les
protectorats… Devoir d’ingérence, par exemple, en Bosnie, au Kosovo, en Libye,
etc. avec bombardements humanitaires
assortis. Même que le Pédalonaute voulait en faire profiter la Syrie. Nos généraux ont pu le retenir in extremis par
la veste vu nos manques de moyens…
- Et puis il y a le droit d’ingérence dont on se garde bien de nous parler.
C’est le droit que confère le pouvoir d’ingérence. Droit d’ingérence
permanent, en tout et partout, que s’arroge celui qui se pense le cœur de
l’unilatéralisme avec les succès et les conneries que l’on sait. Déjà, en 1944,
Roosevelt avait prévu de doter la France d’administrateurs anglo-saxons en
territoire occupé… Si les commissaires de la République de De Gaulle ne les
avaient pas pris de vitesse pour occuper les préfectures, les communistes
auraient pris le pouvoir au départ des GI’… Ce que Roosevelt voulait pour la
France, Bush l’a fait pour l’Irak. Mais je m’égare…
Ce pouvoir d’ingérence se
manifeste désormais de façon plus subtile. La matière est suffisamment complexe
pour que l’inculture pousse les médias à s’en désintéresser et les politiciens
européens à abonder dans le sens de l’Empire par incompétence, paresse
intellectuelle ou manque de courage. Le plus bel exemple actuel est sans doute
le projet de traité commercial transatlantique…
Mais ce n’est pas tout. Sentant son hégémonie planétaire se dérober sous
ses pieds, l’administration US pousse désormais ses feux dans la précipitation,
avec de moins en moins de discrétion et, sans doute, en faisant de plus en plus
de conneries.
La dernière en date est la pression exercée par les USA sur la Bulgarie
pour qu’elle suspende les travaux du South
Stream. La Bulgarie avait pourtant jusqu’alors résisté aux tentatives de
l'Union européenne d'empêcher la construction de ce gazoduc. Mais elle a dû
céder aux ukases des Etats-Unis ; d’autant que ceux-ci bénéficiaient de la
complicité active de la Commission de Bruxelles, laquelle a exigé que la construction
du tronçon bulgare du gazoduc soit suspendue jusqu'à ce que le projet soit
conforme aux normes de son document interdisant aux producteurs de gaz de
posséder des réseaux de transport et de distribution d’hydrocarbures... Du
coup, la Serbie se voit contrainte de différer la construction de la suite…
South Stream ? Juste une carte et des chiffres-clefs pour
résumer :
L'UE s'oppose depuis longtemps à la réalisation de ce gazoduc supposé être
lancé fin 2015 pour livrer en Europe jusqu'à 63 milliards de mètres cubes de
gaz. Et elle cherche très officiellement à le faire capoter depuis l'automne
2013. Et, comme par hasard, les USA non plus n’en veulent pas.
Pourtant, cela sécuriserait sur le long terme l’approvisionnement de
l’Europe occidentale en gaz à des tarifs conventionnés, la Russie ne pouvant
alors plus se priver de notre clientèle pour rentabiliser les énormes
investissements en infrastructure qu’elle aura consenti pour ce projet. Alors
pourquoi ce rejet par "Bruxelles" ?
Ben, dans le désordre, on pourrait évoquer quelques raisons :
- D’abord, pour des motifs politiques, idéologiques et une phobie antirusse,
l’UE, contre l’avis de plusieurs Etats-membres, veut contraindre Gazprom à se
maintenir dans la dépendance des relations Moscou-Kiev pour son principal axe
d’exportation. Ce qui, entre parenthèse, créé pour nous un risque de rupture
d’approvisionnement à la première crispation du Kremlin ou des foutraques
imprévisibles de Kiev !
- Ensuite, plus bestialement mais tout aussi sûrement, parce que Kiev
envisage de restructurer son secteur gazier et, vu l’état de ses finances, de
céder ses gazoducs à des consortiums d’entreprises américaines et européennes.
Des négociations seraient déjà en cours avec Shell, ExxonMobil et Chevron. Non
seulement cela permettrait aux amerloques de contrôler l’approvisionnement en
gaz de l’Europe mais… la mise en service du South Stream ruinerait la valeur de
leurs actifs !
- Enfin, accessoirement pour l’instant, l’Oncle Sam aimerait bien nous
fourguer un jour son propre gaz par bateaux à son tarif…
Bien entendu, la Commission de Bruxelles qui-défend-nos-intérêts marche dans
le coup, à pied, à cheval et en voiture… propre.
J’évoquais au début la connerie de la diplomatie US canonnière + dollar.
L’abandon du South Stream pourrait nous apporter quoi d’autre ?
- Accessoirement, un regain d’euroscepticisme bienvenu chez nombre d’eurodéputés
Bulgares, Hongrois, Slovènes…
- Mais, surtout, une raison de plus, ou simplement une confirmation, donnée
à Poutine d’accentuer encore plus sa politique déjà bien avancée de
rapprochement économique et géostratégique avec la Chine pour ne plus avoir à être
en affaire ou à devoir tenir compte de ces guignols d’Europe occidentale…
L’espérance trilatérale : USA – Eurasie de Brest à Vladivostok – Chine
élargie, si tant est qu’elle ne fut pas qu’un rêve ploukèmien, est
définitivement enterrée.
On restera un Disneyland périphérique par la grâce de l’U.E.
Comme le disait je ne sais plus qui (Bismarck je crois) :
"Dans un système à trois
puissances, il faut être l’une des deux".
Si avec çà on réussi pas à en faire crever quelque uns de froid cet hiver et quelques autres de chaud l'été qui suit... Y'a pas à dire nonobstant les morts la guerre c'était mieux avant. Merci pour cet éclairage, chez nous on aime ce qui est dur à vendre. Et on dit que trois c'est un de trop, parce que le binaire c'est plus que la mode. Tout çà ça ressemble à un complot contre les peuples occupés à tirer la couverture.
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