Je
regarde les législatives de mon balcon. Pas pour "prendre de la
hauteur", non. Je regarde ça de façon très terre à terre et je vais y
revenir. Quand je dis "de mon balcon", je veux dire que l’âge, la
déprime et la lassitude m’ont fait lâchement renoncer à m’en mêler, que ce soit
en tirant les sonnettes, en collant, en tractant, etc., comme je l’ai fait dans
ma jeunesse mais pas seulement, parfois avec mais le plus souvent sans
illusion. Et aussi en bossant, en amont comme en aval, dans la stratégie, la
tactique, les éléments de langage
comme on dit maintenant, l’intox, les réseaux, etc. "J’ai déjà
donné"… Toujours pour la bonne cause
et à ma manière… Pour que vous ne vous mépreniez pas sur ma façon de considérer
ce genre de chose, je vais vous citer un exemple vécu par le Plouc :
"Il
était une fois" des législatives et une circonscription à jeu assez ouvert
sans sortant en piste. Plus d’un an à l’avance, X y pense en se rasant. La
trentaine assumée, compétent, efficace, déjà bien rôdé aux mandats en
collectivités locales, certes un peu trop "clivant" pour les mous du
genou mais ayant la niaque, le savoir-faire et, surtout, un mec bien câblé aux fondamentaux politiques et spirituels solides…
Je marche à fond dans son truc ; ça prend tournure et le RPR qui a investi
un jeune invertébré commence à se faire du souci… Bref, l’étiquette aidant, l’invertébré
termine au 1° tour devant X et la gauche est localement haute… Retrait,
désistement, toussa… M’étant un peu trop frité avec un des bras gauches de
l’invertébré, je rentre à la maison et me pointe dans l’isoloir le dimanche
suivant. Sachant que la majorité était cette fois-là sûre de rester en place sur
le plan national, nous étions localement en présence d’un socialo en fin de
maturité au déclin de sa carrière de second couteau de sous-préfecture face à
un invertébré sans autre conviction que suivre celui qui lui assurera sa place.
Mais un jeune du genre que l’électrice de base aimerait avoir pour gendre. Il
était probable que si la droite restait aux affaires, ce mec-là une fois élu on
en prendrait pour quinze ans sans pouvoir faire émerger une relève locale. Ce
jour-là, pour la première fois (et j’espère la dernière) le Plouc a voté socialo… Le guignol a malgré tout été élu.
Et
qu’a ensuite fait le Plouc ? Il… est allé bénévolement bosser pour l’invertébré…
Pourquoi ? Ben, puisque ce mec était là, autant que, dans divers domaines,
ce soit le Plouc qui lui en cause à sa manière et lui écrive certains trucs
plutôt que… d’autres. Le mec savait d’où je lui venais mais n’aurait
jamais pu imaginer que je n’avais même pas voté pour lui au second tour ! [il a depuis été sorti
par la gauche et je n’y suis pour rien…]
Pourquoi
vous causer de ça ? Parce que je suis atterré par ce que je vois sur le
terrain. Et ce que je vois trouve notamment son origine dans les distorsions
délétères dues au système de financement des partis politiques. Ça brouille
l’intrigue sur le théâtre des opérations
bien plus que l’inflation des ambitions personnelles, lesquelles contribuent au
moins à l’émergence de sang neuf (ou non)…
D’abord,
j’ai été surpris par le nombre d’e-mails reçus de droite et de gauche (enfin, toujours de
droite…)
de jeunots (pour
moi, c’est-à-dire déjà souvent des quadras…), tous bien câblés, mecs ou nanas,
généralement rencontrés et appréciés dans
l’action en des temps pour moi révolus et rangés au rayon des souvenirs
d’ancien combattant. Ils se lancent dans la bataille, les uns ici, d’autres
là (même
chez les français de l’étranger !); et leurs e-mails me sollicitaient
évidemment pour un financement et plus si affinité… Hormis deux cas relevant de
la simple figuration dans le cadre du financement des partis évoqué plus haut
et de leur souci de remplir les quotas,
je me dis que la plupart feraient de bons députés. Je n’ai répondu à aucun et
je m’en veux un peu…
Ensuite,
descendant acheter mon pain, je découvre l’autre jour les panneaux électoraux
encore vierges fraîchement installés par la mairie : 17 ou 18 candidats
attendus dans mon douar de cantonnement ! A y regarder de plus près sur
les 14 circonscriptions du département (13 candidats en moyenne, maxi 21…) la majorité des
candidats n’est là que pour tenter d’obtenir à leurs petites formations les
subsides promis par l’Etat pour les cinq ans à venir. C’est leur droit légitime
et on les comprend…
Mais
aujourd’hui, avec ce système abscons franco-français (uninominal à deux
tours)
couplé au cordon sanitaire républicain
(certains
ont un droit d’expression restreint aux
limites fixées par les autres et ne sauraient
être élus),
on va tout droit à un désastre. Il faudra que j’expose un jour ici mon système de scrutin que j’évoquais
déjà il y a plus de vingt ans accoudé au zinc de je ne sais plus quel café du
commerce (uninominal
à x tours en un seul tour ; j’y reviendrai…) Mais bon, je m’égare…
*
Au vu du gouvernement qui nous a concocté notre Président normal,
il est manifeste qu’il voudra aller au bout de son projet de réforme
constitutionnelle sur le droit de vote des étrangers aux élections locales. Or
comme avait coutume de dire Pompidou : "Quand la borne est franchie, il n’y a plus de limite…" A
l’instar de l’IVG vendu au bon peuple pour la santé de la mère qui est devenu
par glissement naturel le droit
inaliénable de disposer du contenu de son ventre dans tous les cas, le vote en
question conduira automatiquement au remplacement de la notion de nationalité par celle de résident légitime… Et par
glissement naturel, à l’évaporation de tout ce que peut contenir le concept France et son remplacement par une vague
notion réductrice de territoire administré… Comme le chantait Souchon :
"On avance, on avance ! Ya bientôt
plus d’essence pour aller dans l’aut' sens…"
La
"majorité présidentielle" disposera d’une majorité parlementaire,
n’en doutons pas. D’ailleurs, au point où nous en sommes, le contraire ne
serait pas souhaitable. Autant qu’ils puissent nous imposer leurs conneries
législatives et en porter l’entière responsabilité devant le peuple dans cinq
ans (moins
ce serait bien^^)
En
revanche, pour la réforme envisagée, il faut tout faire pour qu’ils ne
puissent pas nous la fourguer vite-fait par la voie parlementaire ! Car
s’il leur faut passer par la voie référendaire, ils laisseront tomber comme
Mitterrand qui l’avait déjà promis…
Donc, il ne faut pas qu’ils puissent disposer de la majorité requise des
trois cinquièmes au Congrès. 3/5° des
348 sénateurs et 577 députés, ça fait 555… Il y a déjà 178 sénateurs de
gauche et assimilés. Si j’y ajoute, allez, une vingtaine de sénateurs
centristes mous du genou, il leur faudra 357 députés prêts à voter la réforme
constitutionnelle. Avec la marge de sécurité à prévoir compte tenu des
démocrates et autres centristes étiquetés plutôt à droite mais du genre à se
laisser convaincre, il ne faudrait pas que la majorité présidentielle dispose
de plus de 300 ou 310 sièges à l’Assemblée Nationale, ce qui leur sera bien
suffisant pour gouverner (maj. absolue : 295)… Retenez bien ça : 310… Ce sera
notre ligne bleue des Vosges…
Ce scrutin est donc important.
*
Dans ce contexte, je suis atterré par ce qui se passe sur le terrain. A cet égard, j’ai choisi (au hasard^^) deux
circonscriptions que je trouve exemplaires :
-
La première, ce sera vite vu. C’est la nouvelle 8e circonscription de Paris, composée
de l’ancienne 8° (le gros du XII° arrondissement) auquel on a ajouté un bout du
XX°. La sortante de gauche sera réélue. Si je l’évoque, ce n’est pas seulement
parce que s’y bousculent pas moins de 23 candidats, record national. C’est l’occasion
de se demander pourquoi cette circonscription est passée à gauche en 2007. Bien
sûr, on évoquera la boboïsation du XII°. Mais est-ce suffisant ? Je trouve
cette circonscription exemplaire de la connerie, du copinage, de l’endogamie de milieu et du mépris de
l’électeur manifestés par les appareils de la droite de gouvernement : Savez-vous qui était le candidat
portant les couleurs de l’UMP en 2007 ? C’était… Arno Klarsfeld…
Et
savez-vous qui porte les couleurs de l’UMP cette fois-ci ? C’est… Charles Beigbeder. (Fondateur compulsif de
sociétés d’avenir comme Poweo dont il
céda vite-fait ses actions, le cours s’effondrant curieusement juste après,
ci-devant président de la candidature d’Annecy aux JO, etc. Frère de Frédéric.) parachuté là dans
le cadre du duel Copé-Fillon…
[à titre indicatif, si je votais là, je crois que je serais tenté par un
certain Frank Margain, je dis ça, je dis rien…]
-
La deuxième, ça ne vous étonnera pas, c’est celle de mon douar
d’élection ! Et là, c’est vraiment "l’exemple exemplaire" ! Voilà un département "plus à
droite tu meures", pire peut-être que le Haut-Rhin. Et le coin sans doute
le plus à droite du département… Même Passy qui nous tient lieu de banlieue
rouge pour qu’on ait l’air un peu comme tout le monde, Passy où on a brûlé deux voitures
et demi en avril 2002 et on s’en souvient encore, Passy, donc, a voté Sarko à
52%. Ailleurs les scores les plus minables étaient au-dessus de 57% dans les
villes d’en bas, 70 à 85% dans les villages… Et vous savez quoi ? C’est
peut-être bien parti pour élire une socialo ! Une première dans le coin au
moins depuis le règne d’Alexandre de Macédoine (pour avant je manque de documentation^^)
Résumons.
Contrairement à Paris qui perd trois députés, l’évolution démographique
attribue un 6° siège à la Haute-Savoie. On décale tout et cette création
recouvre le "haut pays" et son voisinage, c’est-à-dire un mélange de
stations de ski, de villages, de petites villes et une moyenne. L’élu(e) sera
vraiment le premier "député du Mont-Blanc"…
Dans
cette nouvelle configuration, le député UMP sortant du secteur se replie
logiquement sur la basse vallée maintenant centrée sur Bonneville dont il est
maire et tout un chacun guigne le fauteuil tout neuf. Du côté de la gauche, le
PS laisse évidement généreusement la place à une radicale de gauche ancienne
maire de Servoz, vivement encouragée à aller au casse-pipe avec un suppléant
aimablement fourni par Europe-Ecologie. Le Front de gauche envoie l’ancien
maire de Passy faire le hallebardier d’opéra par principe. Ajoutez en poids
plumes une trotskiste ou assimilée et deux écolos indéterminées pas forcément
gauchos mais qui ne veulent pas de camions dans la vallée… Et en face il y a quoi ?
Figurez-vous
que les hautes instances parisiennes de l’UMP n’ont rien trouvé de mieux que de
parachuter pour cette place théoriquement gagnée d’avance une charmante dame,
certes native et conseiller municipal de Morzine, mais surtout parisienne et
conseillère de Sarkozy en charge du sport à l’Elysée. Toussa sans consultation
des notables locaux… Alors que beaucoup n’y pensaient pas seulement en se
rasant. Du coup, les candidatures "divers droite" sont sorties comme
perce-neiges : Les poids mi-lourds d’abord : Le maire quasi UMP de
Sallanches, discrètement soutenu par son prédécesseur UMP sur zone, et le maire
conseiller général de St Gervais, genre radical Borloo. Et puis les
autres : Un animateur vedette de la télé locale TV8 Mt-Blanc, plutôt
démocrate-chrétien, connu de tous et adoré des vieux ; le maire Nouveau
Centre de Marnaz ; un autre encore… Et, bien sûr, le gars du FN, élu
municipal à Cluses ; et celui de la Ligue Savoisienne, adjoint à Taninges.
Encore est-on revenu de 16 à 13, le gars du MNR, élu municipal à Scionzier
laissant finalement le champ libre au FN, deux divers-droite dont un adjoint de
Chamonix ayant jeté l’éponge et le FOPOD ayant renoncé par civisme à présenter
un candidat...
Pourquoi
je vous raconte ça ? Parce que dans cette circonscription où le rapport
droite-gauche est de l’ordre de 65-35 et où, à droite, le FN n’a jamais fait
que de la figuration, l’analyse des rapports de force en présence conjuguée au
taux probable d’abstention et à la règle des 12,5% des inscrits conduit à
envisager deux hypothèses possibles pour le second tour :
-
soit l’abstention est faible et on pourrait avoir raz les cheveux un duel entre
deux "divers-droite". On aura alors sauvé les meubles mais ce sera le
plus "mou" qui sera élu.
-
soit l’abstention est élevée et on pourrait avoir un duel gauche contre FN dont
le résultat est bien connu.
C’est
un peu pile ou face…
A
l’idée que ça puisse se répéter ailleurs, j’avoue que mon café a du mal à
passer…
La soi-disant droite tient sa défaite pour acquise. A juste titre évidemment. De là à brûler les vaisseaux qui lui restent, effectivement, c'est un peu fort de café et pourtant c'est ce que nous constatons.
RépondreSupprimerAlors, restons zen et essayons, comme vous dites,
de faire en sorte que ces gens là aient le moins de députés possibles. Il n'empêche que nous sommes foutus.
Amitiés.