L’autre jour à Trappes, une femme de 31 ans a été attirée dans un guet-apens prémédité, dénudée, tondue et violentée par six autres femmes qui la soupçonnaient d'entretenir une liaison avec le mari de l'une d'elles. Soupçonnées de violences aggravées en réunion avec préméditation et séquestration, ces charmantes dames mises en cause qui disposaient d’un Taser sont "inconnues de la justice" (des services de police, nul ne sait) et - surprise ! - étaient considérées (dixit une source judiciaire) comme étant… "des jeunes femmes insérées"…
Parmi tant d’autres qui font désormais la banalité du quotidien, ce fait divers m’a refait penser aux propos que j’évoquais ici où Malika Sorel remettait les pendules à l’heure en précisant le sens des mots insertion, intégration et assimilation.
Il fut un temps où un doux mélange de naïveté et d’utopie généreuse mâtiné d’ethnocentrisme condescendant au parfum colonialiste distinguait les individus de souche allogène selon qu’ils étaient ou non assimilés [je me permets d’oser supposer que les dames évoquées plus haut sont d’origine immigrée, sinon aurait-on dit insérées ?] L’assimilation était alors l’horizon indépassable garant d’une société parfaitement sereine et sûre de son bon droit. Une société où la chance pour la France était de se savoir capable d’assurer à tous (d’où qu’ils viennent) la transmission "des fondamentaux qui composent le noyau identitaire français, ce que l’on nomme le legs ancestral." Cela allait de soi et personne n’y trouvait à redire. Naïveté, disais-je, car par un glissement inconscient (dans tous les sens du terme) vint le jour où l’intégration, en cours ou supposé, valut présomption d’assimilation acquise. C’était d’ailleurs aussi l’époque où la métropolisation-départementalisation de l’Algérie fit croire que la simple appartenance à un territoire valait juridiquement intégration, le droit du sol montrant ainsi son bout du nez… Epoque où, soit-dit en passant, les femmes ayant fauté étaient licitement tondues et violentées par de braves gens parfaitement assimilés gaulois depuis des lustres… Bref, le concept d’assimilation cessa d’être à la mode et l’intégration de nécessaire devint suffisante…
L’assimilation est désormais un mot ordurier ayant rejoint l’espèce d’inventaire à la Prévert qui a remplacé le sexe dans l’ordre de l’obscène. De nos jours, l’intégration n’en est pas encore là mais ça va venir. Les textes que nul n’est sensé ignorer et les plaques vissées sur moult immeubles et organismes financés par vous et moi en sont les beaux restes devant lesquels il convient encore de singer l’esquisse de génuflexion du dévot pressé. Il y a le Haut Conseil à l’Intégration, l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration, le Contrat d’Accueil et d’Intégration, etc. Ouais… Tout ceci est bel et bon mais on va où là ? Comme le dit Malika Sorel, l’intégration est un long processus qui va vers… vers quoi ? Vers l’assimilation ? Vous n’y pensez pas ! Ce serait discriminer entre ceux qui sont plus intégrés et ceux qui le sont moins… Ce concept d’intégration n’est donc plus pertinent. Tout au plus est-il encore utile puisque non mesurable, donc cuisinable à toutes les sauces, pour assurer les fins de mois de moult fonctionnaires et associatifs. A quoi pourrait-il servir d’autre ?
En effet, le contexte d’aujourd’hui rend inutile les discriminations qu’implique rationnellement le concept. L’opposition dialectique entre intégration et non-intégration nécessite de savoir à quoi... Or ce "quoi" c’est quoi ? Vous observerez que le mot citoyen n’est plus jamais utilisé comme substantif car ce serait une inacceptable discrimination entre ceux qui le sont et ceux qui ne le sont pas. Il n’est donc plus utilisé que comme adjectif mis à toutes les sauces, ce qui est bien pratique pour désigner ce que l’on attend des citoy… pardon des ACURABAs (Administré-Consommateur-Usager-Résident-Assujetti-Bénéficiaire-Ayant-droit) Et ce qu’on attend d’eux, finalement, n’est plus de se sentir concerné par le devenir d’une Nation, mais seulement de consentir à un plus petit commun multiple de vivre ensemble… Pour résumer, à ce que l’on attend au moins des insérés tels que les définit Malika… Bref, l’intégration n’a plus lieu d’être et l’insertion de nécessaire devient suffisante…
D’où l’insertion par le travail, les assocs’ oeuvrant à la réinsertion, le Revenu Minimum d’Insertion, und zo weiter…
Ouais… Mais quid des zones de non-droit ? Pardon, des zones prioritaires diverses et variées ? Leurs habitants méritent-ils la contrainte d’être administrés ? assujettis ? Ma notion d’ACURABA n’est-elle pas insultante et vouée à rejoindre celle de citoyen ? Et celle d’ARABE (Allogène-Résident-Ayant-droit-Bénéficiaire-Exonéré) ne serait-elle pas encore trop excessive ?
L’insertion n’a sans doute déjà plus lieu d’être et "Rien", de nécessaire est devenu tout à fait suffisant…
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