"- Ça y
est ! Je savais bien que ça me disait quelque chose…"
Térébenthine
Duclos-Cantamerlo rentrait de Grenoble. Un de ces déplacements en province où
l’appelait, presque chaque semaine, l’impérieuse nécessité pour les plus hautes
autorités de l’Etat de venir s’incliner devant les dépouilles, prononcer
l’oraison funèbre et réconforter les
familles chaque fois que le nombre de victimes d’une guerre de gangs excédait
la moyenne. Cette fois-là, c’était toute une famille de Kosovars liquidée par
des dealers concurrents. Elle était très contente car le nombre exceptionnel de
victimes de la tuerie et la barbarie atroce des méthodes employées lui avaient
permis de prononcer un magistral discours sur "L’insupportabilité de la haine et l’extension du domaine de la lutte
pour le vivre-ensemble" Les
premiers échos de presse étaient excellents.
Dans le jet
ministériel du retour, elle s’était entretenue avec un journaliste du quotidien
Têtu et ils en étaient venus à parler
des sources de financement du journal. Au détour d’une phrase du type, c’est l’évocation
de la Fondation Gerbé qui a provoqué le déclic : elle avait enfin fait le
lien entre le mort de la rue Guy Môquet et ce dernier compagnon de Paul Gerbé
dont on ne parlait plus depuis sept ans…
Il peut
paraître surprenant que ce lien n’ait pas été fait par la police après les
constatations d’usage le jour du meurtre. C’était parfaitement normal. En
effet, depuis la loi de 246 améliorant la protection de la vie privée et les libertés
publiques, la DCRI avait notamment interdiction de détenir dans ses fichiers la
moindre information sur les personnes bénéficiant du statut d’acteur du Progrès. Le fils adoptif de
Paul Gerbé en faisait évidemment parti et tout ce qu’on savait sur lui avait
été scrupuleusement détruit…
Le rapport
établi après le meurtre par le commissariat d’arrondissement mentionnait donc,
outre son nom et son prénom bizarre qui ne renvoyaient à rien d’administrativement
connu, les seuls éléments de la carte d’identité trouvée sur lui ainsi qu’une
vague enquête de routine à son domicile où le voisinage le disait discret et
vivant seul. Les assassinats "à l’unité" étant d’une banalité quasi
quotidienne à Paris et l’affaire ayant été classée "Sans Suites" par
la ministre elle-même, on en était resté là.
A peine de retour
dans son bureau, Térébenthine demanda qu’on lui ressorte la fiche du 19 Dix.
Puis que la PJ fasse une enquête approfondie et prioritaire pour trouver les
coupables. Et, comme si les flics ne connaissaient pas leur boulot, une note interne
et comminatoire précisa expressément qu’il y avait lieu "d’éplucher les archives
de presse et du net concernant Schemeun Sweborg depuis son adoption par Paul
Gerbé jusqu’à sa démission de la Fondation" et "d’orienter
prioritairement les recherches vers les sources d’où émanait la violence des
critiques diffamatoires alors formulées sur leurs actions"...
En effet, ce
Sweborg avait été durant plusieurs années étroitement lié aux activités de progrès pilotées par Paul Gerbé. La
haine qui animait les fascistes à l’égard de ce dernier était sûrement une
piste et le meurtre de son protégé peut-être une vengeance de cette hydre
malfaisante.
Térébenthine
ne pouvait pas négliger cette hypothèse. Il était de son devoir pour la pérennité
du Pacte Républicain de saisir cette
occasion pour rappeler encore à tous et à chacun que la bête était toujours
féconde…
( à suivre... )
Ca va être dur d'attendre lundi.
RépondreSupprimerIl deviendrait vite lassant de répéter chaque jour qu'on lit avec grand plaisir votre feuilleton. Je déclare donc une fois pour toutes que je l'apprécie et que j'en attends la suite avec impatience.
RépondreSupprimerLe plus simple, c'est d'attendre lundi sans rien lire depuis jeudi. Comme ça, on en a beaucoup en une seule fois!!
RépondreSupprimerPopeye